Auteur : PrettyCool Hits : 5670
Lady Oscar > Romance > Si proche de l'autre... >
Chapitre I.


C’était un de ces jours qu’Oscar affectionnait particulièrement même si elle était triste d’avance pour lui, avec suffisamment d’égoïsme pour apprécier sa mission : se rendre à la propriété du Comte de Fersen pour lui annoncer l’annulation d’un rendez-vous galant avec Sa Majesté. Bien sûr, officiellement, le motif était tout autre…

Chaque fois que cela arrivait, trop peu à son goût à vrai dire, elle espérait qu’il finirait par en avoir assez et délaisserait cette maudite autrichienne pour goûter à un des charmes de la France qu’il avait jusqu’à présent négligé.

Elle avait beau apprécier Marie Antoinette, être très amie avec elle, dans ces moments-là étrangement elle la détestait soudain…non cela n’avait rien d’étrange…c’était le sortilège qu’il lui avait lancé… Et pourquoi ceux qui avaient déjà l’amour et n’étaient plus seuls recherchaient encore l’amour d’autres...n’en avaient-ils pas suffisamment ? N’avaient-il pas honte de s’approprier ce que d’autres, autrement plus infortunés, convoitaient désespérément…Ou alors connaître et vivre l’amour rendait les cœurs tellement avides de ce bonheur qu’il devenait nécessaire de l’éprouver à chaque instant…

Un peu comme cette douleur, ce manque qui la tiraillait dès l’instant où il quittait sa vue, sa présence…Elle ne valait donc pas mieux, elle ne se permettrait donc pas de juger, elle n’aurait cependant aucun remord à tenter le tout pour le tout pour qu’il lui appartienne enfin, ce bonheur qui la fuyait.

Les grilles du Palais se profilaient, la demeure était imposante : la famille Fersen était une des plus fortunée de Suède et Oscar aimait beaucoup les aménagements raffinés qu’ils avaient apporté à cette ancienne propriété du Duc d’Anjou. Elle s’y sentait bien, très bien même. Un domestique lui ouvrit la porte et l’accueillit chaleureusement. Oscar était très estimée ici, on connaissait ses exploits, on admirait son courage et sa générosité…

Elle déclina l’invitation du domestique à la conduire dans le Palais. Elle était venue de nombreuses fois, il ne fallait pas se déranger pour elle. De plus, elle irait bien plus vite toute seule.

La roseraie qui ornait la cour avait beau être magnifique en cette saison, elle n’était pas là pour ça…non, son esprit était accaparé par des teintes plus froides que le pourpre de ces fleurs, celles de ce regard magique dont elle ne se lasserait jamais…non jamais…

Ce regard, ce visage si…comment dire…non aucun mot ne venait…alors à quoi bon mettre des mots sur ces pensées si douces, ces visions si chatoyante de ce visage sublime, tout y était si harmonieux…Non il n’était pas qu’un visage, tout son corps, tout son être était façonné par cette pureté, cette beauté, une harmonie. Elle divaguait, oui elle divaguait mais peu importait, il était tellement doux de se laisser emporter dans ce bonheur…

Des voix ?…non elle ne pouvait entendre des voix ? Elle sombrait dans la folie ? Comment ne pouvait-on pas sombrer dans la folie face à pareil homme ? Non, non elle ne rêvait pas.

Elle fut tirée de ses pensées par des sons étranges…On aurait dit une femme…une femme était en détresse !
Le Colonel reprit donc le dessus et abandonna ses pensées pour se concentrer sur le moment présent, et l’urgence de la situation. Il fallait au plus vite trouver l’origine des plaintes. Qui sait un rôdeur s’était peut-être introduit ici ?

Au fur et à mesure qu’elle s’approchait, les gémissements se faisaient de moins en moins plaintifs. D’ailleurs les « oh ouiiiiii » finirent par lever toute ambiguïté sur la nature de ces vocalises…

Persuadée qu’elle avait rejoint les appartements du Comte, sa hâte se transforma rapidement en rage, oubliant le caractère improvisé de sa visite.

« Comment ose-t-il ! »

La jalousie…mais aussi le doute et l’envie, Fersen qu’elle s’imaginait comme un amant transi de la Reine, ne serait pas aussi intègre qu’elle l’avait toujours cru, étrangement ce défaut dans l’être idéalisé ne faisait que le rendre plus désirable car peut-être accessible malgré tout…oui ce ne serait pas l’amour parfait dont elle avait maintes fois rêvé…mais pourquoi se contenter des rêves…pourquoi ne pas succomber aux tentantes imperfections de la réalité ?

Elle voulait en avoir le cœur net, même si cela la blesserait à n’en pas douter…Non, cette douleur serait nécessaire pour l’inciter à réagir à l’avenir, ne pas se laisser porter par le cours de la vie, à attendre que le regard cristallin vienne s’égarer dans son océan. Pourquoi ne serait-elle pas aussi combative qu’une épée à la main ? Oui elle se battrait, oui elle triompherait. Elle qui jamais ne reculait devait affronter la peine immense de voir son cœur se déchirer, contempler sa propre souffrance au rythme des soubresauts de plaisir que ce corps masculin donnait à cette jeune femme, jusqu’à s’en dégoûter…

Oscar retint son geste et revint sur ses pas. Elle connaissait les lieux, ne les connaissait que trop…La jalousie un instant plus tôt, et maintenant la culpabilité ; dévorée par cette éternelle morsure que sa noblesse de coeur lui imposait. Face à elle, la jeune femme malgré sa vaillance ne pouvait lutter, sa décision prise elle l’assouvissait jusqu’au bout. Voir…Regarder les yeux bien ouverts et secs, tandis que son âme pleurerait. Et se guérirait, peut-être…

Elle entra dans la chambre vide, voisine de celle contenant son calvaire futur, tourna discrètement la porte communicante habilement camouflée dans le mur. Une chambre qui avait dû connaître nombre d’intrigues amoureuses, aujourd’hui passif témoin de la douleur d’une femme cachée sous l’habit dérisoire du Colonel. La pièce était plongée dans une semi-obscurité confortable, un peu bleutée due à la couleur des tentures qu’on avait tirées sur le soleil à présent presque couchant. Il ne faisait même pas nuit, et cet homme se livrait à la pire trahison imaginable pour un cœur malheureux !
Malheureuse et écoeurée elle l’était déjà, tellement…

Oscar marcha comme un silencieux automate vers l’autre pièce, celle aménagée en boudoir abritant tant de peines pour elle, et d’extases pour lui…
Les cris de plainte lascives camouflaient le bruit de ses pas, tandis qu’un subtile parfum de femme effleurait ses narines sensibles, lui lacérant un peu plus la conscience. Oscar ne pouvait s’empêcher de se mépriser pour ce qu’elle osait faire, mais aucun poids ne pouvait rivaliser contre son dévorant amour pour lui, rien…
Elle avançait, encore…vit la pointe du couvre-lit froissé, le désordre d’une toilette de goût échoué tel un inutile et précieux chiffon sur le sol. Et le paravent servant à voiler le petit nécessaire de toilette dont toute chambre se parait. Pour autant la vraie souffrance n’était pas de voir mais d’entendre, et d’imaginer l’innommable qui bientôt allait jaillir contre ses yeux meurtris. Ce plaisir intime que jamais elle ne connaîtrait…le bonheur de se sentir aimer, caressée par le seul homme sur terre qui faisait battre son cœur…Oscar glissa un peu plus dans la souffrance et dans la pénombre bienfaisante qui prenait soin de son anonymat, la seule amie sur qui compter…

Elle ne vit qu’une vague forme au début, des gestes qui épousaient les mouvements souples des corps, des courbes tendres accompagnées de soupirs de pur contentement. La Colonelle enfonça ses ongles dans sa paume en se forçant à en voir davantage, ses yeux s’accoutumant peu à peu à l’obscurité.

Rien ne pouvait la préparer à voir pareille scène en effet…
Cherchant désespérément sa respiration, Oscar détailla la jeune femme qui se tordait de plaisir, sous les mains de…de Sofia, la propre sœur du Comte de Fersen !
Review Si proche de l'autre...


Disclaimer .:: géré par Storyline v1.8.0 © IO Designs 2002 ::. Design adapté par korr