Existe-t-il plus majestueux souverain que l'hiver? Il n'y a que Décembre p.ur faire d'un forêt son royaume, laissant courir sa longue traîne blanche sur le sol sous les arches des frondaisons glacées tandis que le monde sous son règne plonge dans un mutisme respectueux.
Et il cachait dans un tout petrit coin de son immense palais paré de givre deux statues frissonnantes, deux enfants immmobiles, à demi couverts de neige.
Les doigts bleus et meurtris, Oscar et André étaient recroquevillés dans le froid. Oscar regardait son ami en silence. Comme il semblait dormir paisiblement. Elle dégagea une mèche brune de ses yeux et serra un peu plus contre lui. Un grand calme l'envahissait. Elle sentait le vent hivernal caresser son épaule et l'entourer de ses bras. Pourquoi auarit-elle eu peur?
Elle savait que bientôt elle aussi sommeillerait dans ce giron immaculé.
Tout lui semblait si loin...comme ce matin où elle avait entendu les flocons frapper sa fenêtre en se levant... Etait-ce vraiment aujourd'hui ou il y a des siècles? Ce chocolat chaud que Grandmère lui avait apportait sur son plateau, fumant à côté de belles tartines de pain blanc... Ces rires qui hantaient sa mémoire, quand André et elle s'étaient roulés dans la neige, laissant l'empreinte éphémère de leurs corps comme des fantômes gris dans la glace... Tout celà existait-il vraiment?
Et ces regards complices alors qu'Oscar dévoilait son secret à André... Une clef... une innocente clef d'argent qui ouvrait le bureau de son père, là où il conservait ses armes hors de leur portée.
Les épées étaient si étincelantes sur le mur. Oscar aimait voir son reflet dans l'éclat pur de ce métal forgé pour combattre. Ces épées lui ressemblaient, à la différences de ces grossières épées de bois dont elle avait dû se contenter. Comment son père pouvait-il la priver de ces joyaux?
Grandmère, trop prise par ses tâches, ne les avait pas vu descendre l'escalier en dissimulant peu habilement leur larcin derrière leur dos.
Certes ces épées semblaient bien lourdes pour eux qui n'avaient que sept ans. Oscar s'aidait des deux mains pour manier la sienne, mais après s'être entraînée un peu, elle n'était pas mécontente du résultat. Il se dégageaient de ces armes une telle puissance et une telle grâce...
André lui, était toujours aussi maladroit, mais avec de vraies épées, il mettrait peut-être du sien au moins pour se défendre, si elle lui faisait suffisamment peur.
Elle n'avait pas voulu ce qui s'était passé. Elle s'était lancée sur lui plus vite qu'elle ne l'avait cru, entraînée dans son élan par le poids de l'épée. Il n'avait pas paré... il n'avit pas crié... il n'avait rien vu... il n'en avait pas eu le temps...
Oscar ne comprit pas... ou plutôt elle ne voulait pas comprendre... Comment avouer cette bétise à son père?
Elle ne pouvait pas... ce n'était pas une bétise... c'était bien pire. Folle de terreur elle avait soudain vu dans un éclair rouge la réalité de son avenir. Elle sût alors que ce qu'elle avait vu miroiter sur l'épée, c'était un être misérable, abject, destiné à tuer.
Elle ne voulait pas être comme ça, mais il était trop tard car le monstre était déjà en elle, rongée par ce crime qu'elle ne pensait plus qu'à cacher.
Oscar avait erré, traînant André dans ses bras, erré jusqu'à tomber d'épuisement... En agissant ainsi, elle n'espérait pas oublier ce qui était arrivé. Elle voulait juste retrouver André pour lui demander pardon.
L'hiver l'avait comprise. En entendant des appels au loin, elle s'inquièta un peu. Mais il la rassura bien vite. Il avait effacé le mal, effacé ce grand sillon de sang qui menait jusqu'à eux. Et personne ne les trouverait avant qu'il n'ait effacé ce cauchemar que l'on nomme la vie.
Alors apaisée, Oscar posa sa tête contre celle d'André et ferma les yeux.
FIN |