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Parenthèse


« Aidez moi…aidez-moi colonel… »

Les paroles d’Alain résonnaient dans la tête d’Oscar. D’après André, il allait mieux, beaucoup mieux que ce jour où ils l’avaient retrouvé veillant sur la dépouille de celle qui fut jadis sa sœur, sa petite sœur adorée : Diane. Pourtant ce qui avait décidé Alain à relever la tête, ce n’était pas les paroles du colonel ou de son ami, non, ce qui l’animait aujourd’hui était un désir de vengeance. C’est ce sentiment qui le gouvernait maintenant. Oscar repensa à Rosalie. Rosalie qui elle aussi avait souffert à cause de la noblesse, Rosalie qui elle aussi avait voulu se venger de cette noblesse. Oscar se disait qu’avec Alain, ce serait différent. Si elle accédait à sa requête, si elle l’aidait, elle n’était pas certaine de pouvoir l’arrêter au moment crucial. Elle gagnerait du temps, certes, mais rien ne lui laisse penser qu’il finirait par abandonner son idée. D’un autre côté si elle ne l’aidait pas maintenant, dieu seul savait de quoi il serait capable. Elle se résigna. Elle l’aiderait.

***

« Oscar, vous vous rendez compte de ce que vous me demandez ? »
Elle garda le silence. Elle savait qu’il accepterait et elle se sentait honteuse de jouer sur les sentiments qu’il lui portait.
« Nous y voilà Oscar, tu te comportes en femme, tu utilises un homme, tout comme la Du Barry l’aurait fait » pensa-t elle.
Il la regardait. Dieu qu’elle était belle. Il allait céder, tout comme il céderait devant ce regard une fois encore quelques mois plus tard. Elle était si déterminée. Il ne comprenait pas bien pourquoi elle voulait aider ce gueux, mais si elle le voulait alors il ferait ce qui était en son possible.
« Soit. Mais sait-il au moins manier une épée ? Du moins comme un noble..
-Soyez certain que je m’occuperai personnellement de son entraînement Girodel.
-Et pour le maintien et les manières ? Comment comptez vous transformer ce misérable en gentilhomme en si peu de temps ?
-André se chargera de lui apprendre le nécessaire, quant à vous, j’espérais que vous … »
Il la coupa :
« Soit. Oscar. Je le ferai. Je ne peux rien vous refuser. »
Il aurait voulu lui parler, lui demander comment elle allait, mais depuis cette demande en mariage et la façon dont elle l’avait refusée, il savait que les choses étaient différentes entre eux. Il avait creusé un fossé. Il avait été stupide de croire qu’elle aurait pu l’aimer. Elle lui semblait si fragile, si fatiguée. Elle lui fit ses adieux et sortit.

***

Sébastien Alain de Girodel, soit disant cousin du comte de Girodel, en avait surpris plus d’un à commencer par le comte lui-même. La transformation de Alain Lavigne, soldat des gardes françaises en gentilhomme de la noblesse avait été remarquable.

Après des débuts difficiles, les 2 hommes s’appréciaient maintenant à leur juste valeur. Victor Clément ouvrait les yeux grâce à Alain sur les souffrances du peuple de France et se rendait compte que la tempête grondait, que lorsqu’elle serait là, sur eux, il serait trop tard pour lui et les siens.
Alain aurait voulu rallier Victor Clément à sa cause, ce noble qu’il avait d’abord détesté. Mais il comprenait aujourd’hui que celui ci resterait fidèle par devoir à ceux qu’il avait jurés de protéger même s’il devait payer de sa vie pour ça. Alain appréciait ce sens du devoir.

Victor Clément l’avait guidé à la cour, l’aidant à déjouer les pièges des courtisans et surtout il lui avait fait rencontrer l’homme qu’il jugeait responsable de la mort de Diane. Ce noble avait maintenant un visage. Cantonné à la caserne, Alain n’avait pas eu le loisir de faire la connaissance du promis de sa sœur. Diane lui en avait si souvent parlé. Il était beau, séduisant et il l’aimait. Elle rayonnait de bonheur. Le mariage était fixé au début du printemps. Alain avait émis quelques réserves lorsqu’elle lui avait dit qu’il était noble. Mais elle l’avait rassuré : il était de petite noblesse, peu d’argent, ne fréquentait pas Versailles et surtout il lui avait fait un serment d’amour. Sa mère aussi avait été rassurante. Le jeune homme était venu à plusieurs reprises dans leur modeste logis et avait sa demande en mariage de façon très solennel.

« Rien ne laissait entendre qu’il l’abandonnerait…vous comprenez ? »
Victor Clément opina de la tête même si il savait à quel point un noble sans le sou, était sans doute la dernière des personnes en qui avoir confiance. Les 2 hommes se faisaient face, un verre de vin à la main. Le feu brûlait dans la cheminée et pour la centième fois, Alain contait l’histoire de Diane au comte. La pauvre enfant, abandonnée la veille de son mariage, avait mis fin à ses jours. Alain la vengerait.
« Que comptez vous faire maintenant que vous connaissez M de Richefort ?
-…Faire en sorte que le duel soit inévitable entre nous… » dit Alain après un silence.
En 2 mois la détermination d’Alain n’avait pas faibli. Une drôle de petite flamme brillait constamment dans ses yeux. Girodel se devait d’avertir Oscar. Elle lui avait demandé de gagner du temps, de retarder ce moment où Alain ferait face à l’amant de sa soeur. Elle avait espéré que Alain finirait par renoncer à venger la mort de Diane dans le sang tout comme Rosalie avait renoncé à l’ultime seconde. Victor Clément était inquiet. Il savait qu’il ne pourrait faire entendre raison à Alain. Il n’écoutait personne, ni Oscar, ni André.
« Alain, vous ne pouvez pas provoquer un homme en duel ainsi, sans motif… »
Alain éclata d’un rire sinistre.
« Mais ne vous inquiétez pas M le Comte, Richefort aura un motif valable … je lui en fournirai un….
-Puis-je savoir lequel ? »
A ces paroles et ce rire, l’inquiétude de Victor Clément grandissait. Après tout le nom de sa famille aussi était en jeu.
« Alain, je vous en conjure, n’agissez pas dans la précipitation…elle est mauvaise conseillère.
-Vous me croyez aveugle ? Vous croyez que je ne sais pas ce que vous essayez de faire, vous et le colonel aussi… »
Girodel ne répondit pas. Nier aurait été un aveu.
« Rien, vous entendez, rien ne m’arrêtera. Dites le bien au colonel…
- Alain…
- N’ajoutez rien, s’il vous plaît… »
Le silence se fit dans la pièce. Victor Clément méditait l’histoire de Diane et il se disait que l’amour n’existait pas en ce bas monde. Que de souffrances inutiles….
Alain brisa le silence :
« M’accompagnez-vous à Paris ?
- Non je vous remercie de l’invitation, mais je la décline ce soir. Changez-vous les idées mon ami. N’oubliez pas que demain, vous serez présenté à la reine. Ne me décevez pas Alain, j’ai placé le nom des Girodel entre vos mains.
- N’ayez crainte. Irez vous au bal ce soir que donne la Polignac ?
- Me de polignac, Alain ! Non, je ne suis pas véritable d’humeur joyeuse voyez-vous. A demain mon ami.
- A demain. »
Alain était légèrement déçu du refus du comte. Il avait pris goût à ces sorties nocturnes en sa compagnie. Il était si amusant de voir le comte évoluer au milieu de la populace. Alain était néanmoins surpris, même vêtu pauvrement, Victor-Clément dégageait une certaine prestance. Sa beauté naturelle, ses longs cheveux attiraient les filles et Alain s’amusait des réactions du comte lorsque elles l’approchaient et tentaient de l’emmener dans leur couche. Il était si maniéré Peu à peu, Girodel avait réussi à évoluer dans le monde d’Alain. Mais ce soir, c’est seul qu’il irait.

***

Bien que courte, l’entrevue avec la reine s’était déroulée à merveille. Alain et son prétendu cousin déambulaient maintenant dans les couloirs du palais. Des dizaines de paires de yeux les observaient, les dévisageaient.
« Quel succès mon cher cousin ! Regardez moi toutes ces dames qui se cachent derrière leurs éventails en vous dévorant du regard !
-hum hum…mais c’est aussi pour vous cousin » répondit Alain. Les 2 hommes s’amusaient.
« Vous n’avez jamais songé à vous marier ?
- Alain c’est une question à laquelle je ne souhaite pas répondre. Pourrions-nous éviter le sujet ?
- Je ne comprends pas, toutes ces beautés n’attendent qu’un geste et vous, vous … »
Girodel ne lui laissa pas finir sa phrase :
« Assez ! Epargnez-moi. Aucune de ces dames ne m’inspire de l’amour. Vous avez appris à les connaître pourtant….
- Certes, mais vous m’avez aussi appris à mon arrivée qu’il ne faut pas juger trop vite sur les apparences et que certains nobles méritent qu’on leur donne un peu de crédit…Bizarrement j’ai le sentiment que vous me cachez la véritable raison de votre célibat. Je vous ai observé Victor Clément, qu’elles soient nobles ou honnêtes travailleuses ou même filles des rues, aucune ne trouve grâce à vos yeux… »
( Aucune sauf…. ) pensa le comte.
« Alain qu’allez vous insinuer ? Que peut être j’aimerais…. »
Devant la moue passablement offusquée du comte, Alain laissa éclater un rire sonore et joyeux.
( Enfin mon ami…un peu de joie en vous, tout n’est donc pas perdu. Vous reviendrez peut être à la raison )
« Pour être honnête, j’aime. J’aime une femme d’une grande beauté et au cœur le plus pur qui soit. Mais elle ne m’est pas destinée et ne le sera jamais.
- Vous n’êtes pas assez riche pour elle ? »
Cette fois, ce fut au tour de Victor Clément d’éclater de rire. L’idée d’Oscar se refusant à lui pour une vulgaire histoire d’argent, l’amusait beaucoup.
« Elle me m’aime pas voilà tout. Tout l’or du monde ne pourrait rien y changer. Elle n’est point femme à céder pour de l’argent. Elle m’a volé mon cœur et je l’accepte. »
Alain allait répondre au comte, il voulait connaître le nom de cette femme aussi sensationnelle mais c’est à ce moment précis que tout bascula. Oui, quand il y repenserait plus tard, c’est à ce moment là que tout avait changé, quand un ange l’avait percuté au détour de ce couloir.
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Elle avait les yeux marrons, d’un marron si foncé qu’ils en étaient presque noirs. Des mèches de cheveux d’un roux flamboyant, encadraient un visage à la peau laiteuse. Des larmes coulaient sur ses joues. Elle se releva péniblement. Elle semblait paniquée.
« Mademoiselle, vous allez bien ? »
Elle ne répondit pas au comte de Girodel. Elle ne le regarda même pas, son regard était plongé dans celui d’Alain. Le temps semblait s’être arrêté. Pourtant bien vite, elle recouvrit ses esprits et repoussant Alain, reprit sa course et disparut au bout du couloir.
« Vous la connaissez ? Qui est elle ?
-Aucune idée. C’est bien la première fois que je croise cette demoiselle à la cour.
-Girodel ! Le colonel m’avait dit que vous connaissiez tout le monde !
- Et bien je suis désolé de vous décevoir, mais il n’en est rien. Je ne connais pas cette femme. Elle semble jeune, une nouvelle arrivante sans doute qui à mon sens vient de goûter à la médisance des courtisans. »
Alain et le comte en eurent la confirmation très rapidement. Un groupe de dames passait maintenant et tout en les saluant, les 2 hommes saisirent des bribes de leur conversation.
« Quelle petite dinde !
-Une vraie sotte….
-N’a t on pas idée… »
Le groupe s’éloignait déjà.
« Il faut leur demander qui était cette jeune femme… »
Girodel retint Alain par le bras.
« Restez tranquille !
- Mais je veux…
-Oui je le comprends bien, mais vous êtes à la cour ici, vous semblez oublier certaines règles de bienséance
- Bienséance ! Vous me parlez de bienséance alors qu’il est clair que ces vieilles sorcières ont maltraité une jeune fille.
-Alain.Par la grâce de dieu, ne vous emportez pas ainsi Vous ne pouvez pas demander à ces dames qui elle était. Rassurez vous je le saurai bien assez tôt. »
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« Comment va-t il Girodel ?
- Il s’est très vite adapté à ma grande surprise. Par contre son désir de vengeance est encore très fort et malheureusement je n’ai pu éviter qu’il fasse connaissance avec le marquis de Richefort.
- Mais vous deviez empêcher qu’ils se rencontrent » s’écria Oscar. Elle sentait la colère montait en elle.
« Si il arrive quoi que ce soit à Alain, vous serez responsable
- Oscar, je ne souhaite en rien une confrontation entre Alain et Richefort. J’ai joué de malchance, Richefort n’aurait pas du se trouver là ce jour là.
- Il est pourtant sous vos ordres »
(Comme vous êtes injuste avec moi oscar)
Girodel reprit :
«Oscar, vous devez regarder la réalité en face. Ni vous, ni moi, ne pourrons empêcher Alain de faire ce qu’il souhaite. »
Mais Oscar ne semblait pas vouloir entendre raison, elle prit congé du Comte.
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Les couples dansaient, tourbillonnaient au son d’une valse. Alain avait passé la soirée à chercher le marquis de Richefort qui selon Girodel aurait du être présent à ce bal.
« Tiens, tiens, d’ailleurs où est-il donc ce diable de Girodel ? » se demanda Alain. Il chercha le comte des yeux. Alain souhaitait rentrer et il aurait aimé signaler son départ à son ami. Celui restait introuvable. Alain décida de partir.
Alors qu’il traversait les jardins, il la vit. Son ange était là. Elle sursauta.
« Qui êtes vous ? Que me voulez-vous ?
- N’ayez crainte mademoiselle. Je me prénomme Sébastien Alain, cousin du comte de Girodel.
- Et que vous soyez cousin de ce comte, fait de vous un honnête homme ? »
Alain sourit doucement et répondit :
« Assurément non. Néanmoins, c’est vous qui prenez des risques à rester seule ainsi dans ce parc obscur. »
La jeune femme se détendit. Elle leva les yeux vers Alain. A la lumière de la lune, elle reconnut les traits de l’homme. C’était bien celui qui l’avait relevé après sa chute l’autre jour.
« Pourquoi ne rentrez-vous pas à l’intérieur, vous y seriez en sécurité.
- Non »
Ce non avait sonné sèchement puis la voix se radoucit.
« Je ne peux pas. Elles…..elles sont odieuses avec moi. Je ne suis rien ici à la cour. Mon père…. »
Le flot de parole se tarit. Silence de la nuit. Puis :
« Je suis désolée, je ne sais pas ce qui m’a pris de vous raconter ça…adieu Monsieur.
- Non, ne partez pas ,je vous en supplie. Contez-moi votre histoire. »
Il lui avait saisi la main. Que sa peau était si douce par comparaison avec la main calleuse du soldat !.
Alors elle parla….

***

Victor clément était atterré. En voyant la réaction d’Alain vis à vis de l’inconnue, il avait pensé à juste titre qu’elle lui plaisait. Il s’était dit que c’était peut être le moyen pour détourner Alain de son objectif. Certes Alain n’était pas vraiment noble, mais si les choses se compliquaient, si l’amour touchait ses 2 là, il aviserait en temps et en heure. Victor clément pensait qu’il était plus facile de négocier avec un homme amoureux qu’avec un homme assoiffé de revanche. Il s’était mis en quête du nom mais depuis qu’il avait appris l’identité de la belle, il se disait qu’il devait maintenant tout faire pour empêcher Alain de la revoir. Peut être devrait-il alerter Oscar. Mais que ferait-elle de plus ? Victor clément regretta sa faiblesse, pourquoi avait-il accepté cette tâche ?!! Il maudissait cette passion qu’il nourrissait pour Oscar… jusqu’où l’entraînerait elle….
La comtesse de Mercy le tira de ses pensées.
« Et bien mon cher, vous arrivez trop tard. Me de Loison m’a dit que vous portiez de l’intérêt à ma nièce : Eloise. Je suis au regret de vous apprendre qu’elle est mariée depuis peu au marquis de Richefort. Voyez vous…. »
Le comte n’écoutait plus cette vieille ragôteuse, à nouveau, il se demandait comment sortir Alain de cette situation.

***

C’était un ange. Il n’en doutait plus. Il venait de vivre le meilleur moment de sa vie. Quelques heures en compagnie d’Eloise et le monde était à nouveau beau, coloré, plein d’espoir. Sa fraîcheur lui rappelait Diane. Oh oui Diane aurait aimé Eloise.
Alain fut surpris de trouver Victor Clément assis sur les marches du grand escalier qui menait aux chambres. Celui ci l’attendait.
« Où étiez vous ? Je vous ai cherché !
- Ah mon ami ! j’ai revu mon ange
(Mon dieu non…..)
- Elle n’est pas seulement belle, Victor, elle a un cœur pur
-Vous a-t elle dévoilé son identité ?
- D’elle je ne connais que son prénom, son si joli prénom, elle se prénomme Eloise…
- C’est tout ? Vous ne savez rien de plus ?
- Non. Mais vous Victor, vous allez sans doute me l’apprendre… »
Girodel hésita un instant puis choisit de mentir.
« Non je n’ai rien appris sur elle. Je suis même assez étonné que vous ayez réussi à la revoir. Personne ne semble la connaître à Versailles. Que vous a-t elle dit ? »
Alain s’assit à côté du comte et commença son récit.

*****

Une éternité…. pensa Alain.
Quelques jours, une semaine tout au plus se dit Girodelle.
La perception du temps qui s’était écoulé jusqu’au dénouement du drame était fort différente selon les 2 hommes.
Depuis cette tragique nuit, cette nuit où Eloise s’était sacrifiée pour le sauver, le temps semblait avoir repris son cours normal. La parenthèse avait été refermée. Sébastien Alain de Girodel n’était plus. Il appartenait au monde des fantômes. Alain Lavigne, lui était bien vivant, et avait repris sa vie à la caserne la parenthèse refermée. Il se demandait quelquefois, s’il avait déliré, si Eloise, son amour pour elle, sa mort, si tous ces événements avaient bel et bien existés. La tempête grondait, Alain le savait. Un jour, il ferait face à son prétendu cousin, chacun ayant repris sa place. Ses compagnons aux gardes françaises, n’avaient posé aucune question, pour eux Alain avait juste mal accusé la perte de sa sœur et il avait sombré. Son retour voilà quelques jours en avait surpris plus d’un, mais ils avaient si heureux de le revoir vivant. La tristesse et la douleur étaient gravées sur son visage, un masque de douleur qu’il porterait jusqu’à sa mort.

**************

20 ans qu’il avait quitté Paris.
« Tout a changé et pourtant tout est identique » pensa-t il.
Il errait dans les rues. Il ne savait pas encore ce qui l’avait poussé à revenir, à quitter ce coin de terre qu’il cultivait, près de l’endroit où sa chère Maman et sa douce Diane reposaient.
Il s’était arrêté et contemplait le spectacle qu’offrait la rue, en fermant les yeux, il revoyait clairement la ville au moment où l’insurrection et le chaos avaient débuté.
« Mais les choses devaient changer, évoluer » songea-t il
Soudain là à quelques pas de lui, il reconnu une silhouette familière. L’homme s’apprêtait à monter à cheval, Alain cria :
« Victor Clément! eh oh l’ami…. »
L’homme se retourna.
(Pas de doute…c’est lui…vieillit, les cheveux plus court mais lui…)
« eh Victor…on ne reconnaît plus son cousin ? »
Devant la bonne humeur d’Alain, celui qui autrefois était Comte de Girodel, consentit un sourire.
« Alain ! taisez-vous donc…et appelez moi Sébastien…
-Vieille canaille, je n’aurais jamais cru être aussi content de vous revoir.
- A qui le dites vous…mon cousin fantôme…
- Une chope ? Pour fêter nos retrouvailles ?
- Avec plaisir l’ami »

Une fois attablés, les 2 hommes s’observèrent silencieusement. La dernière fois qu’ils s’étaient parlés, c’était lors de cette horrible nuit pensa Alain. Victor Clément rompit le silence :
« Le passé fait mal. On croit oublier, mais jamais, il resurgit toujours et la douleur qu’on pensait vaincue, refait, elle aussi, surface…
- Vous parlez comme si l’être aimé vous avez aussi été volé..
- C’est le cas Alain, dans des circonstances différentes des vôtres, mais la mort a frappé…
- Victor, qui était donc cette mystérieuse femme que vous aimiez ? - Vous ne me l’avez jamais dit..
- Vous n’avez jamais deviné…c’est pourtant si facile
- Je la connaissais ?
- Elle était votre colonel… »
Alain resta muet devant cet aveu.
« Et oui Alain, j’aurais pu avoir toutes les femmes de la cour, mais c’est celle que je ne pouvais avoir que je voulais. J’ai longtemps cru que c’était par pur défi, mais non, du jour où j’ai croisé son regard et le fer de son épée, mon cœur a été volé…
- Et ben ça alors…Le colonel oscar…
- Mais dites-moi Alain, puisque l’heure des confessions semble arrivée, me conterez vous les événements de cette nuit où Eloise perdit la vie ? Je crois vous avoir sauvé ce jour là, j’ai mis ma confiance en vous et non en Richefort et puisqu’il s’est enfui peu de temps après, je suis convaincu d’avoir pris la bonne décision.
- Richefort s’est enfui ? Lâche jusqu’au bout et dire que ma sœur avait cru en ses belles paroles. La mort d’Eloise comme celle de Diane, est une blessure ouverte qui ne semble pas vouloir se refermer. Il m’est difficile encore aujourd’hui de parler d’elle.
- Je vous comprends.
- Néanmoins, vous avez raison je vous dois une explication sur cette fameuse nuit. Comme vous le savez………. »

***********
Eloise était si belle dans cette robe qui rehaussait son teint et l’éclat de ses yeux. Ils se retrouvaient dans les jardins de l’hôtel particulier de la jeune femme. D’après elle, son mari s’absentait tous les soirs, il n’y avait aucun risque. Elle le détestait. Elle savait qu’il ne l’avait épousé que pour sa dot et ne comprenait pas pourquoi son père avait préféré cet homme là à d’autres gentilshommes bien plus respectables.
« Ah M de Girodel, si nous nous étions connus quelques mois plus tôt, je ne doute pas que mon père vous aurait accepté pour gendre. La réputation de votre famille et de votre cousin n’est plus à faire…Vous nous imaginez, vous et moi mariés…..heureux si heureux comme nous le sommes maintenant ? »
Et elle riait, et elle rayonnait, elle était si heureuse. Pourtant Alain, ce soir là était envahi d’une tristesse causée par l’aveu de Victor Clément de Girodelle.
Girodelle lui avait finalement appris le nom de la jeune femme. Elle était Madame de Richefort, la femme de son ennemi. Girodelle avait supplié Alain de renoncer à la voir. Si vous l’aimez alors ne la mêlez pas à cette histoire, Alain c’est une innocente tout comme votre sœur, elle a servit de marchandise entre son père et Richefort. Ne lui faites pas de mal, sa vie à la cour n’est que misère et souffrance avait dit le Comte.

« Souffrances ? Vous croyez que je pourrais me servir d’elle contre Richefort ? Il n’aime pas sa femme, il n’apprécie pas Eloise à sa juste valeur, mais moi je l’aime et…
- Et quoi. » avait répondu le comte
« ….Que comptez vous faire, l’emmener vivre à Paris ? Vous croyez que l’amour efface les différences ? vous croyez vraiment qu’elle pourrait vivre comme…
- Comme ? Allez y dites le ....Comme une gueuse…..c’est ce que vous pensez du peuple, n’est ce pas ? M le comte…
- Alain, il ne s’agit pas de moi, Alain réfléchissait, je vous en conjure , rompez et reprenez votre vie, cette histoire de vengeance est stupide, admettez le enfin…
- Je vous croyez mon ami, j’ai eu tort. Adieu monsieur.
- Alain ! Alain ! Ecoutez moi et.. »
Mais il avait déjà quitté la pièce, et il était là près d’une Eloise insouciante, sa dispute avec Girodel en toile de fond. Il ne pouvait se résoudre à l’abandonner, mais si Eloise aimait Sébastien Alain de Girodelle, aimerait elle Alain Lavigne, pauvre soldat des gardes françaises ?
Un cri de rage le tira de sa torpeur.
« Eloise qui est cet homme ? Que fait-il ici en pleine nuit ? »
Richefort son rendez vous annulé, était rentré plus tôt avec dans l’idée d’apprendre à mieux connaître cette épouse qu’il avait du prendre pour se sauver de la ruine. Diane n’avait pas vraiment quitté son esprit et il se demandait ce qu’elle était devenue après sa dérobade. Diane si belle, si fraîche, son amour qu’il avait trahi pour de l’argent.
A la vue de Richefort, Alain fut pris de rage. Cet homme là était un monstre, il avait tué Diane et il faisait souffrir Eloise. Eloise ne disait mot, l’angoisse se lisait sur son visage. Les 2 hommes se faisait face. Richefort le premier saisi son épée.
« Allez vous parler ? Qui êtes vous monsieur »
La réponse que fit Alain causa une énorme surprise aux époux Richefort
« Je suis, monsieur le lâche, le frère de cette pauvre enfant que vous avez abandonnée la veille de son mariage. Le nom de Diane Lavigne vous dit quelque chose ? »
Richefort devint livide.
« Diane est morte monsieur, le lendemain de votre acte si lâche, elle a décidé qu’elle ne pourrait vivre sans vous. Vous êtes à mes yeux le responsable de décès de ma sœur et je la vengerai.
(diane est morte, oh mon dieu, Diane…)
« J’aimais sincèrement votre sœur, mais…
- Mais l’argent est plus fort que l’amour dans votre monde ? C’est ça, Richefort ? La vie de Diane ne valait rien. Vous êtes répugnant. »
Richefort se reprit :
« Parce que vous pensez que venger votre sœur en salissant l’honneur de ma femme est une vengeance digne de ce nom ? Eloise, réveille-toi, cet homme là, est un gueux, aucune noblesse, je me demande même comment vous avez réussi à convaincre Girodelle que vous étiez son cousin. Vous êtes un fieffé menteur.
- Sébastien, est ce vrai ? Vous ne m’aimez point ? Vous cherchiez juste à heurter Ferdinand ?
- Non, c’est faux Eloise. Je ne connais votre nom que depuis hier soir. Croyez-moi Eloise, jamais je ne me serais servi de vous. Je vous aime Eloise, tout roturier que je sois.
- Assez maraud, cette fois c’’est fini, tu vas mourir. »
L’épée était sortie du fourreau sans qu’Alain ne réalisa vraiment, il contemplait Eloise et se disait que ça valait peut être mieux de mourir ici, maintenant, de lui prouver à quel point il l’aimait.
Puis le drame était arrivé, Eloise s’était interposé, mettant sa vie sur le chemin de cette épée. Elle s’effondra dans les bras d’Alain. Un mince filet de sang d’un carmin pur coulait de sa bouche
« oh non non Eloiseeeeeeeeeeee…. »
Elle sourirait et dans un souffle dit :
« Pardonnez aux nobles que nous sommes Alain puisque c’est votre véritable prénom. Pardonnez-nous vos souffrances. Alain, je vous aime…merci pour ces instants de bonheur …que vous m’avez offert…. »
Les yeux marrons se fermèrent. Alain pleurait, à travers les sanglots, il hurla :
« Nonnnnnnnnnnn Eloise, nonnnnnnnn, Eloise…… »
Le temps s’était figé. Ferdinand de Richefort semblait absent, l’arrivée de Girodelle lui fit recouvrer ses esprits.

***

« La suite vous la connaissez, ses accusations comme quoi j’avais tué sa femme, que j’étais un fou ayant usurpé votre nom….vous m’avez surpris Victor, votre nom était en jeu, j’ai pensé que vous alliez vous rallier à sa version.
- Richefort était de cette race de noble que je détestais Alain. Diane, puis Eloise, combien d’autres auront souffert à cause de cet homme là. J’aurais presque aimé le tuer quand je vous ai retrouvé dans ce jardin, le sang d’Eloise sur vos mains, son corps sans vie. Au vu des trafics auxquels Richefort se livrait, il a été facile de le faire renoncer à vous accuser.
- Savait vous ce qu’il est devenu ?
- Je vous l’ai dit, dès que les troubles ont commencé il a disparu. »
Le silence à nouveau.
« Nous reverrons-nous un jour Victor ou bien était ce là, la conclusion véritable de cette parenthèse dans ma vie ? »
Victor ne répondit pas. Les 2 hommes se donnèrent une vigoureuse poignée de main. Puis chacun repris son chemin dans la vie.

FIN
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