La saint valentin
En fin d’après-midi, Oscar et André s’entraînaient au tir et, comme chaque fois qu’ils étaient seuls tous les deux, passaient un bon moment.
Lorsqu’André voulu remettre des bouteilles sur le support il s’aperçut qu’il n’y en avait plus. « Je crois que nous allons nous arrêter là pour ce soir » dit-il à son amie.
Il prit les armes d’Oscar et les rangea dans leur boîte. Puis il prit une pomme et demanda à la jeune femme si elle en voulait une. Celle-ci ayant répondu par l’affirmative, André lui lança l’un des fruits mais, avant qu’Oscar ait pu s’en saisir, une balle le fit éclater.
André furieux et Oscar étonnée se demandaient bien qui avait pu se permettre un tel acte. L’invité mystère se mit à rire d’un rire franc.
- Alors mes amis ! Ai-je changé à ce point ? C’est votre vieil ami revenu des Amériques !
- Fersen !, s’écria Oscar.
Tandis que le jeune suédois descendait de cheval pour les rejoindre, Oscar se mit à courir vers lui. Il eut juste le temps d’ouvrir les bras pour l’y recevoir.
- Vous êtes vivant ! S’écria-t-elle en passant les bras autour de son cou.
- Eh bien mon amie, quel accueil !!
- Pardon Fersen, mais je suis si heureuse de vous revoir.
- Bonsoir Fersen, dit André en s’approchant à son tour.
- Bonsoir André.
Les deux hommes échangèrent une chaleureuse poignée de main.
André arracha Oscar des bras du comte. La jeune femme lui fit un doux sourire et glissa sa main dans la sienne.
- Voulez-vous dîner parmi nous ? proposa-t-elle à leur ami.
- Avec plaisir, répondit-il.
Tous rentrèrent gaiement au manoir des Jarjayes où grand-mère leur servit un excellent repas. Les deux jeunes hommes mangèrent de bon appétit, mais Oscar, comme à son habitude, toucha à peine son assiette.
- La chambre de Monsieur de Fersen est prête comme tu me l’avais demandé, dit grand-mère en pénétrant de nouveau dans la pièce.
- C’est très aimable à vous mais je me vois contraint de décliner votre offre, répondit le jeune suédois.
- Non vraiment j’insiste, dit Oscar qui ne voulait pas rater l’occasion de profiter un peu plus longtemps de la présence de son ami.
- Maintenant qu’on vous tient, on ne va pas vous lâcher de si tôt, ajouta André.
Après le dîner, ils allèrent prendre un bon verre de vin devant la cheminée.
Fersen leur racontait ses aventures et ses mésaventures.
- Là-bas, en Amérique, il existe une fête intéressante. Elle s’appelle la Saint Valentin.
- En quoi consiste-t-elle ? demandèrent en chœur les deux amis.
- Eh bien, c’est la fête des amoureux. Je trouve d’ailleurs cette idée assez originale. Ce soir-là est l’occasion de déclarer sa flamme à la personne qu’on aime, ou bien de la demander en mariage, ou encore de lui offrir un bijou. Mais moi je sais que cela m’est impossible… Ce qui ne va pas m’empêcher d’aller à Versailles demain demander à la Reine une entrevue pour après-demain soir. Car après-demain nous serons le 14 février, date de cette fameuse Saint Valentin.
- Eh bien bon courage Fersen !
- Merci Oscar, je sais que ce n’est pas gagné d’avance.
- Bien donc ça me laisse deux jours pour aller dans une bijouterie acheter un cadeau pour ma bien-aimée.
- André, je ne savais pas que tu avais quelqu'un, s’exclama Oscar.
- Oh toi !! Ce que tu peux être curieuse, répondit-il en rougissant.
Fersen éclata de rire.
- Ah vous deux ! J’adore quand vous vous disputez, vous êtes trop drôles.
André et Oscar le fusillèrent du regard.
- Bon mes amis, ce n’est pas tout ça mais j’ai fais une longue route et je suis épuisé, alors je vous souhaite une bonne nuit.
- Vous avez raison, d’ailleurs nous allons y aller aussi. En plus je dois encore réfléchir au présent que je vais offrir à ma bien-aimée, répondit André qui ne pu s’empêcher de sourire en voyant Oscar serrer les poings.
Une fois dans leur chambre respective ils se déshabillèrent, se brossèrent les cheveux et se glissèrent dans leur lit.
Oscar se retournait sans cesse, se demandant bien qui pouvait être la femme qui faisait battre le cœur d’André. Toutes ces pensées la mettait au supplice. André amoureux !! Cela lui semblait impossible.
Elle décida de se lever, prit un chandelier, descendit les escaliers et se dirigea vers la chambre de son ami. Elle frappa discrètement et entra. Le jeune homme était torse nu les bras croisés derrière la tête, un sourire au coin des lèvres. Oscar s’approcha du lit et y posa un genou.
- Je vois que tu ne dors pas encore, lui dit-elle
- Et non ma grande.
Il tira la couverture et invita son amie à venir se glisser dans son lit.
- Non André, je préfère m’asseoir, nous ne sommes plus des enfants. Et je ne voudrais pas prendre la place de ta bien-aimée, dit-elle, sentant les larmes lui monter aux yeux.
- Arrête de dire des sottises, dit-il en se redressant. Tu vois bien qu’il n’y a personne.
Oscar se retrouva plaquée contre son torse. Elle sentait son cœur battre la chamade. André lui essuya les yeux du revers de son pouce et lui donna un chaste baiser sur le front.
- Cesse de t’inquiéter, la femme que j’aime ne le sait même pas. Alors installe toi et dors.
Oscar ne se le fit pas prier. Elle s’installa et André se mit à lui caresser le dos de sa main gauche et déposa de nombreux baisers sur sa chevelure. Il finit par s’endormir à son tour.
Aux premiers rayons du soleil Fersen alla faire un tour dans le parc familial puis il revint prendre son petit déjeuner et demanda si Oscar et André étaient levés. La soubrette qui se trouvait là lui répondit que non.
- Quelle chipie !! S’exclama grand-mère qui se trouvait également dans la pièce. Elle dort encore avec André !! Ce ne sont plus des enfants !
Fersen éclata de rire.
- Oh grand-mère, ça vous met tellement en colère ? Ce ne sont plus des enfants comme vous dites, ils savent ce qu’ils font.
- Grrrrrr, oh ces enfants !!!!
Grand-mère retourna à ses occupations.
André s’éveilla, baissa les yeux et vit une chevelure blonde et ébouriffée. Il la caressa, la remonta sur son torse et entendit un grognement qui le fit sourire.
- Ça ne change pas ! Quand on bouge mademoiselle, tu grognes !
Oscar changea de côté et André déposa un baiser sur son front et lui caressa le dos par-dessus sa chemise.
- Allez mon poussin, on doit se lever. Et en plus, Fersen doit attendre.
- Ah oui je l’avais oublié !
- A mon avis pas lui.
Ils se levèrent. André se rendit dans son boudoir où il se lava, se rasa et retourna dans sa chambre. Il éclata de rire en voyant qu’Oscar s’était recouchée. Il courut jusqu’à son lit et l’attrapa.
- Chipie j’ai dit debout !!
Oscar éclata de rire.
- je ne dors pas, je me réveille.
- Ah tu veux te réveiller ? Ne bouge pas je vais te réveiller moi !! Dit-il en la chevauchant pour lui faire des chatouilles.
- Arrête, supplia Oscar en riant.
- Ça y est, mademoiselle est réveillée ?
Oscar pouffa de rire.
- Et depuis quand tu m’appelles mademoiselle toi ? Ce n’est pas comme ça d’habitude.
- Bien ma rose, dit-il en l’attrapant pour la mettre debout. Allez Rose, tes devoir t’appellent ainsi que ton invité, ajouta-t-il en déposant un bisou sur sa joue.
Ils sortirent de la chambre main dans la main.
- Allez, va te préparer, je vais faire ton chocolat et tes tartines.
- A tout à l’heure mon André.
- Bonjour Monsieur de Fersen, avez-vous bien dormi ? demanda André en pénétrant dans la pièce où l’invité finissait son petit déjeuner.
- Oui André, comme un loir. Ça me change de ma couche en Amérique ! Et toi André, demanda-t-il avec un sourire en coin.
- J’ai dormi comme un bébé.
Il entreprit de préparer le déjeuner d’Oscar lorsque grand-mère l’assomma d’un magistral coup de louche.
- Mais grand-mère !! Qu’est-ce que j’ai encore oublié ?
- Rien mon chenapan. Mais combien de fois vais-je vous répéter de ne plus dormir ensemble. Vous n’êtes plus des enfants.
- Ah je vois, tu nous as surpris.
- Calme toi grand-mère, on a été sage, dit Oscar qui venait d’entrer
- C’est vrai ça ma petite fille ?
- Mais oui grand-mère, depuis le temps tu n’as pas confiance en ton petit fils !!
- Ah moi, si je m’ennuie, je sais où aller, dit Fersen en éclatant de rire. Bon je vous laisse à regret, je vais aller voir ma reine et retourner chez moi.
Oscar prit son petit déjeuner et André alla préparer les chevaux. Puis Oscar alla le rejoindre et ils partirent pour Versailles. Oscar se rendit auprès de ses soldats tandis qu’André partit en direction de Paris où il avait l’intention d’acheter un cadeau pour la Saint Valentin. Il se dirigea vers une bijouterie, jeta un coup d’œil dans la vitrine et entra. Un regard lui avait suffi à trouver exactement ce qu’il voulait : une petite rose blanche dont la tige et la feuille étaient en or. Le bijoutier s’approcha de lui.
- C’est ceci que vous désirez monsieur ? C’est pour vos fiançailles ?
- En quelque sorte oui monsieur. Et cela va aller comme un gant à celle à qui je vais l’offrir.
- Dois-je vous faire un paquet cadeau monsieur ?
- Oui avec plaisir, je vous remercie. Combien je vous dois ?
- Trois livres.
- Tenez.
André partit avec le sourire et alla faire ses corvées le cœur léger. Au coucher du soleil il se rendit à l’étang pour se changer les idées et se relaxer. C’était un endroit connu seulement de lui et d’Oscar. D’ailleurs cette dernière s’y trouvait déjà. Debout, face à l’étendue d’eau, elle semblait plongée dans ses pensées. Sans bruit André vint se placer derrière elle, la prit dans ses bras et posa sa tête sur la sienne.
- Que fais-tu là ma beauté ?
- Je réfléchis. Qui est cette femme qui te fait tourner la tête ? Je ne vois pas qui cela peut être et ça me turlupine.
- Dis donc rose, quand je te vois faire les yeux doux à ce cher comte suédois je ne te demande rien.
Oscar se retourna, elle avait les larmes aux yeux.
- Mais je ne suis pas amoureuse de Fersen !!
André s’assit au pied du vieux chêne et attrapa Oscar qui protesta.
- Arrête de faire l’enfant s’il te plait ! On est pas bien là ? Demanda-t-il en caressant ses doux cheveux. La sentant grelotter il la couvrit d’un pan de son manteau.
- Merci.
- Puis-je te poser une question Oscar ?
- Oui André je t’écoute.
- Sais-tu ce qu’est l’amour ? As-tu déjà ressenti ça pour quelqu'un ?
- Bien sûr André que je sais ce qu’est l’amour. Tu m’en donnes un peu plus chaque jour et pourtant des fois je me montre désagréable !
- Alors explique moi.
- Tout d’abord pour Fersen qui te rend jaloux, ça me fait sourire d’ailleurs, je ressens une profonde et sincère amitié. L’amour je l’ai déjà ressenti d’ailleurs je le ressens toujours et depuis que j’ai l’âge de sept ans quand mes yeux ont rencontré deus yeux émeraude.
André renversa Oscar qui atterrit sur le dos dans l’herbe André au-dessus d’elle. La jeune femme ne disait plus rien. Leurs regards se perdaient l’un dans l’autre. André déposa un chaste baiser dans son cou et de son autre main, caressa Oscar sous le manteau.
- Merci de m’avoir répondu. La femme que j’aime c’est toi. Tu es le soleil de mes nuits, mon double. Sans toi je suis perdu et moi aussi quand je t’ai vue la première fois j’ai ressenti une telle émotion. Sur le coup je n’ai pas compris, je ne l’ai su que beaucoup plus tard. C’est drôle mais j’ai toujours su que tu m’appartiendrais mon amour.
- Moi aussi André je l’ai toujours su.
- Je t’aime, dirent-ils en chœur.
André se pencha dangereusement Oscar ferma les yeux et ils échangèrent ainsi leur premier baiser |