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Un pari osé..!


Ses mains… ses mains l'attiraient toute entière à lui…son souffle s'accélérait…la chaleur de ce corps…son bras droit qui la tenait par les épaules tandis que sa main gauche s'aventurait très au sud de sa taille… elle respirait par saccade…elle suffoquait…
Soudain elle parvint à dégager ses lèvres de l'étreinte non sans regret…respirer, oui elle en avait besoin, d'ailleurs lui aussi avait le souffle court…
Il s'approcha à nouveau, embrassant avec légèreté son cou, ses mains reprenant leurs caresses…
« Ce misérable avait-il juré sa perte ?! Pensa-t-elle, jamais ils ne sortiraient de cet endroit !! »
Comment y étaient- ils entrés déjà ? Ah oui, elle se souvenait…



Tout avait commencé dans sa chambre, quelques jours plus tôt :


« - Non, c’est impossible…tu dois te tromper ou on t’auras mal renseigné, je ne crois pas une seconde a une telle éventualité !
- Ma source est pourtant formelle Oscar !
- Et qui est-elle, justement, cette source ? L’ami d’un cousin marié à la voisine du jardinier de Girodelle ? Pff André tu es trop crédule mon ami ! »
Elle riait avec grâce.
« - Désolé ma très chère mais je le tiens de la propre femme de chambre de Girodelle, déclara André un sourire satisfait sur son visage.
- Peu importe après tout, c’est une absurdité, et je refuse d’y croire… rends toi compte André, le ridicule de tes dires ! … essaie d’imaginer ne serait-ce qu’un instant le Comte avec… avec... »
Puis elle partit dans un fou rire magistral, essayant de lâcher ses côtes pour faire des signes avec ses mains. Le fou rire gagna André qui eu peine à articuler…
« - Moque toi Oscar, je reste certain de ce que j’avance.
- Ridicule !
- Tu m’as l’air bien confiant en ton lieutenant… irais-tu jusqu'à engager un pari ? »
A présent, il la fixait si intensément qu’elle se sentit troublée et cessa de rire. Elle se redressa.
« - D’accord, mais quel en sera l’enjeu ? »
Il lui adressa un sourire,
« - Quel sera mon gage si je perds ? » questionna André.
Oscar fit mine de penser. Elle regarda autour d’elle et posa les yeux sur son uniforme de colonel. Son visage s’éclaira !
« - Tu m’accompagneras à tous les bals auxquels ma fonction m’oblige à assister et ce sans t’en plaindre. »
Elle était fière de sa trouvaille. André se défilait trop souvent face à ces mondanités où elle s’ennuyait a mourir. Un peu de compagnie, surtout lui si cher à son cœur, l’aiderait à supporter tous ces vils courtisans.
« - Et moi ? reprit-elle. Si je perds ? Quel sera mon gage ?
Un grand sourire plein de malice lui fit face. Ne sachant comment réagir, elle lui sourit à son tour, levant des yeux interrogateurs vers ses prunelles vertes, cherchant à percer le secret de ses pensées.
« - Un baiser. »

Et il sortit des appartements d’Oscar comme s’il avait été poursuivi par le diable en personne. Cette dernière restée sur place, n’avait pas bougé d’un pouce, le même sourire aux lèvres.

Un baiser…

Ses mots prononcés résonnaient en elle.

Un baiser…

Ses yeux s’agrandirent lorsqu’elle en comprit la signification. André lui avait demandé un baiser ! Il s’était aventuré à lui demander à elle, son amie de toujours de l’embrasser ! Lui qui était comme son frère…où peut être ne l’était-il pas… il ne devait pas penser à elle en amitié pour lui proposer un tel gage… Et elle, comment pensait-elle à lui ?
Une chose était sûre : lors de ses absences il lui manquait terriblement. Plusieurs fois elle s’était entendue parler à Girodelle d’André.

« Si André était là, il aurait certainement dévoré le plat entier de ces petits fours, il en raffole tellement…
Dommage qu’André ne soit pas présent, ce spectacle l’aurait beaucoup amusé…
Regardez cet homme là-bas ! C’est fou comme il ressemble à André… »

« - Oooh André tu vas me le payer ! Si tu t’es moqué de moi, je te le ferai regretter ! »
Sur ces mots elle se saisit de deux épées et se dirigea d’un pas décidé vers l’écurie où elle était certaine de retrouver l’auteur de ses troubles.

En effet, le jeune homme s’y trouvait bien. Il venait de sceller son cheval et achevait de préparer celui d’Oscar. Quand la porte s’ouvrit dans un grand fracas, il ne sursauta même pas, amusé qu’il était des réactions pour lui trop prévisibles de sa belle. Il se retourna pour lui faire face et lui tendit les rênes de l’étalon blanc. Il remarqua alors les épées que tenait Oscar.
- « Alors on va se battre ? D’accord. »
Il lui sourit et enfourcha sa monture pour se diriger vers le lac que tous deux affectionnaient particulièrement.

Durant le trajet Oscar ne décocha pas un mot, dans ses yeux valsaient dangereusement des éclairs sombres. André était tranquille, il sifflotait ce qui l’agaçait encore plus. Cette sérénité qu’il affichait alors qu’elle s’emportait toujours. Enfin, ils arrivèrent sous l’ombre du grand chêne de leur enfance bordant ce lac. Ils descendirent de cheval. André prit avec un sourire se voulant apaisant les rênes des mains d’Oscar. Celle-ci s’empourpra davantage et les lui tendit en tournant la tête pour cacher son trouble.
Ce qu’elle était en colère ! Elle allait de ce pas lui faire payer son affront ! Lorsqu’il acheva d’attacher leurs montures, il rejoignit Oscar devant l’arbre majestueux. Elle lui faisait face, et opposa à son tendre sourire un regard orageux. Elle lui jeta une des deux épées sur les pieds.
« - AÏE ! Oscar ! Tu as perdu la tête ? Ça fait mal ! »

Pour toute réponse elle fondit sur lui, n’attendant pas qu’il se saisisse de l’arme qu’elle venait de lui lancer. André eut tout juste le temps de bondir sur le côté en emportant au passage l’épée.
« - Allons calme toi Oscar ! On jurerait que tu veux ma mort ! »
Oh mais ça n’était pas entièrement faux ça ! Elle était très énervée et se sentait trahie par celui qu’elle considérait encore ce matin même comme son meilleur ami. Celui qui - avec ses idées saugrenues - l'obligeait à se questionner. A le reconsidérer d’un œil neuf… bref, celui qui s’était permis de bousculer l’ordre établi.
Elle fondit encore sur lui, cette fois les lames s’entrechoquèrent. André tenait bon malgré qu’il ait rarement vu Oscar si en colère. Heureusement pour lui : le jeu de sa redoutable adversaire n’en était que moins performant. Elle multipliait les attaques, y mettant toute sa force, et lui opposait ses parades. Elle s’en rendait bien compte. A chaque fois, il semblait l’attendre. Elle était furieuse !
« - André je te déteste !! Comment as tu osé te moquer ainsi de moi ? »
La fatigue se faisant ressentir, elle décida de tenter un assaut original. Elle se retourna précipitamment et l’attaqua à gauche alors qu’il l’attendait à droite. Devant la violence du coup, André préféra l’esquiver et tomba lourdement au sol.
Oscar n’ayant plus de point de butée se mit à pourfendre le vide avec une telle énergie qu’elle en fut déséquilibrée et tomba sur son ami. Celui-ci en eut le souffle coupé.

Cette chaleur qui l’envahissait… Oscar aurait voulu bouger mais son corps refusait tout mouvement. Ses cheveux caressaient le visage d’André. Leurs souffles se mêlaient. Elle se sentit attirée par ses lèvres qui l’appelaient…
Alors que d’une main tendre, il écarta quelques mèches du visage de sa belle, Oscar prit peur et se redressa rapidement, laissant au sol un André hypnotisé. Elle sauta sur sa monture et regagna à grand galop le domaine Jarjayes.
« - Eh bien, pensa André, elle l’a finalement mieux pris que je ne l’aurais cru. »
Puis il sauta sur son fidèle canasson et reprit la route d’un pas tranquille.

Arrivé à Jarjayes il ne fut pas surpris de constater qu’Oscar avait abandonné son cheval devant l’entrée, elle était trop pressée de fuir. Il récupéra donc l’animal délaissé et prit soin des deux étalons, les conduisant aux écuries.
L’après midi passant il décida de visiter Oscar et, pour cela, prétexta de lui monter un chocolat dans sa chambre. Elle était occupée à lire et fit mine de l’ignorer alors qu’il déposait le breuvage sur la petite table à ses cotés.
« - Tu es toujours fâchée ? » demanda André d’une voix suave et tendre.

Seul le silence lui répondit.

« - Sache seulement Oscar que je n’ai pas voulu te blesser, ni me moquer de toi… »

Toujours le silence. Oscar continuait sa lecture seulement André se rendait bien compte que son attention n’y était pas. Il poursuivit.

« - Soit. Je n’ajouterai qu’une chose Oscar ! Si j’ai agi de la sorte, c’était pour toi… pour te faire comprendre à quel point je...je tiens à toi… »
À ces mots, les doigts d’Oscar se crispèrent sur son livre. André s'en aperçut et continua tristement, les yeux plus brillants qu'auparavant.
« - J’ai seulement eu la faiblesse de croire que je pourrai t’embrasser un jour… ne m’en veux pas, je t’en prie… Je renonce à ce stupide pari. »
Il guettait toujours ses réactions pour s'assurer que malgré tout elle l'écoutait.
« - Dès à présent, je reprendrai la place du frère que j’ai toujours été pour toi, Oscar. »
C'est démoralisé qu'il lui souhaita bonne nuit. Et il sortit. A peine le battant refermé que le livre qu'elle tenait entre les mains heurta la porte en bois sculptée.
« - André !! Que m’arrive-t-il ?! Je ne sais plus où j’en suis. Tu m’as perturbée tout à l’heure encore, alors que j’étais si proche de toi, de tes lèvres… Je perds la raison. »


Le lendemain, André eut un réveil bien matinal. Il était triste au couché et ne l’était pas moins au lever. Lorsqu’il passa devant la chambre d’Oscar, il ne put s’empêcher de jeter un coup d’œil à la porte. Celle-ci s’ouvrit soudainement, le clouant sur place.

« - Bonjour André ! »

Oscar l’accueillit avec un merveilleux sourire. André eut un espoir alors. Peut être le pardonnait-elle… il lui sourit à son tour mais plus timidement, baissant les yeux comme un enfant ayant fait une bêtise et s’attendant à une punition.
« - Bonjour Oscar…
- Entre, j’ai à te parler. »
Et d’un signe de la main, elle l’invita à passer la porte qu’elle referma derrière lui.
« - André, j’ai bien réfléchi et j’accepte ton pari. »

Elle attendit sa réaction. Lui attendait la suite, soupçonnant quelques pièges derrière ce revirement subit. Elle ne semblait pas vouloir continuer. Il la dévisageait, cherchant vainement à percer ce mystère. Elle faisait de même, cherchant à comprendre pourquoi il ne réagissait pas.
« - André ? Le pari tient-il toujours ?
- Oh… bien sûr Oscar. C’est que je me demandais ce qui avait bien pu te faire changer d’avis, voilà tout…
- Un Jarjayes n’a jamais reculé face à l’adversité ! »

Elle même était peu convaincue par ses propos. Le regard inquisiteur qu’il posa sur elle l'agaçait et la gênait d'autant plus qu'elle se sentit rougir à présent.
« - D’accord, marché conclu ! »
Il tendit la main. Elle la fixa un instant avant de lui offrir la sienne.

Ce geste n'avait rien à voir avec le bref échange viril que deux hommes pouvaient se donner lorsqu'ils se saluaient. C'était un contact plus doux et plus intense comme une caresse. Elle releva la tête pour lui sourire, troublée, leurs doigts entremêlés.

« - Alors comment comptes-tu procéder pour vérifier lequel de nous deux va gagner ce pari ?
- Ce soir Oscar ! On va pénétrer chez lui ! Déclara-t-il, amusé devant l’air décontenancé de son amie. Oui, tu m’as bien entendu, on va discrètement rentrer dans ses appartements, cette nuit Oscar ! Et tu verras qui aura raison !!
- André ! Tu n’imagines pas ! Comment va-t-on s’y prendre s’il te plait ?... Et si jamais on se faisait découvrir ? Songes-tu une seconde à l’embarras dans lequel nous nous trouverions ?!
- Ne t’inquiète pas Oscar ! Je vais élaborer un plan. »

André sautait de joie. Au vu de la réaction d’Oscar hier, il ne s’attendait à rien de bon pour cette journée. Il pensait l’avoir choquée et qu’elle le détesterait un long moment. Mais non, au lieu de ça, elle avait accepté le pari et son enjeu : un baiser… André espérait de tout son cœur que ses informations étaient les bonnes. Qu’il gagnerait un baiser d’Oscar. Depuis le temps qu’il en rêvait… pouvoir enfin la tenir entre ses bras l’espace d’une étreinte… Et puis s’il venait à perdre, son gage serait bien doux, puisqu’il devrait l’accompagner aux bals.

Un toussotement lui fit remarquer qu’il tenait toujours la main d’Oscar dans la sienne. Il la regarda droit dans les yeux tout en lui adressant son merveilleux sourire. Il fit mine de l’entraîner dans une valse imaginaire. Oscar riait. Elle était heureuse de voir André si joyeux. Elle se savait être la source de ce sourire qui irradiait le visage de son compagnon et s’en trouvait à la fois ravie et gênée… Elle n’avait pas oublié les révélations d’André hier au soir, il lui avait dit qu’il l’aimait…

André est amoureux d’elle !!

Elle avait le cœur serré sans pouvoir se l’expliquer… Au départ elle avait certes mal réagi mais elle pensait alors qu’il se moquait d’elle.

Son cavalier inopiné stoppa subitement leurs pas et la fit tourner sur elle-même une dernière fois. Puis il lui adressa un sourire enjoué, plus tendre que jamais et sortit en courant des appartements d’Oscar.
André, bondissant de tous les cotés, sentait son cœur tambouriner dans sa poitrine. Il devait maintenant trouver comment s’infiltrer chez le comte cette nuit.
Oscar, restée dans sa chambre, songeait. Si elle avait accepté ce jeu, elle ne savait plus vraiment ce qui l’avait fait changer d’avis… Elle ne voulait pas se séparer de lui… il lui en avait coûté de le reconnaître…

Et ces derniers jours elle commençait à le reconsidérer d’un œil neuf. Son ami de toujours n’avait absolument rien à envier aux autres hommes qu’elle connaissait, pas même les nobles car lui possédait la vrai noblesse : celle de l’âme. Et physiquement - et à cette pensée elle rougit - il était plutôt bel homme. Elle n’ignorait pas que son charme ravageur avait fait tourner la tête de plusieurs dames de la cour… Oscar appuya la tête contre la fenêtre de sa chambre, le regard perdu dans le lointain.
« - André, je ne sais plus… »


Le soleil commençait à décliner quand André vint chercher Oscar pour l’emmener chez le comte.
« - Laisse moi t’expliquer : on rentre chez lui par la porte de derrière. On monte immédiatement à l’étage, sa chambre est la deuxième porte. On trouve la preuve et on s’en va. Il devrait rentrer assez tard. J’ai cru comprendre qu’il était en galante compagnie. »
Oscar était restée bouche bée, elle avait cru - ou du moins espéré - qu’André plaisantait quand il voulait entrer chez Girodelle par effraction mais force est de constater qu’il n’en était rien.
« - Es-tu prête ? Car le temps de seller ton cheval et on y va.
- André… mais c’est une folie ! On ne peut pas... »
Il l’interrompit.
« - Serait-ce que tu renonces Oscar ? Dans le temps, ces formalités ne t’auraient pas arrêtée. Tu t’es ramollie ! lui lança le jeune homme, malicieux.
- Non mais pas du tout ! répliqua vivement Oscar.
- Mais n’y aurait-il pas d’autres moyens ?
- Ne t’inquiète pas… reprit André plus calmement. On ne s’attardera pas et Girodelle sera absent. Allez Oscar ! Je t’attends ! »

Il faisait déjà nuit lorsqu’ils parvinrent à l’orée d’une petite forêt bordant le domaine du comte. Ils y laissèrent les chevaux et continuèrent un petit moment à pieds. Le château était déjà visible à travers les arbres.
« - Oscar, si tu es toujours aussi mal à l’aise, il est encore temps de reculer. Mais cela signifierait que tu as perdu notre pari… acheva-t-il, l’air triomphant.
- Je vais le gagner ce pari mon cher André et toi tu m’accompagneras aux festivités de leurs Majestés. »

Elle s’était enhardie sur le chemin. Il lui semblait que André et elle avaient retrouvé toute leur complicité d’antan, comme lorsqu’ils jouaient un tour à grand-mère… Elle était déterminée, à présent, à aller jusqu’au bout.
Ils ne rencontrèrent personne et atteignirent rapidement la porte de derrière. Ils traversèrent la cuisine, profitant de l’absence des domestiques. Ils montèrent à l’étage où ils se cachèrent d’une soubrette en entrant dans la chambre du comte. Là enfin, ils respirèrent.
« - Alors André ? Où est-elle cette preuve pour laquelle on se donne tant de mal ? Je t’écoute…
- Attends un peu… tu ne crois tout de même pas qu’il est homme à laisser traîner au regard de tous une pareille chose… »

André observa quelques instants autour de lui : la chambre était coquette, des tapisseries à dominante orange, un grand lit à baldaquin assorti, deux commodes sur lesquelles étaient disposés toutes sortes de bibelots, et une coiffeuse ! Jusqu’ici, il ne l’avait pas remarquée. Il se précipita vers elle et ouvrit le premier tiroir…

« - Gagné Oscar ! Lança-t-il sans se rendre compte du manque de prudence dont il venait de faire preuve.
- Chuuuut ! Imbécile !! Tu vas nous faire repérer ! Fais voir… Ooooh !!! » s’écria-t-elle avant d’étouffer rapidement ce cri.
André rayonnait. C’était l’évidence même, elle ne pouvait pas nier. Le tiroir contenait au moins une centaine de bigoudis de différentes tailles. A coté était rassemblé un large choix de brosses et peignes ainsi que plusieurs filets pour cheveux. Oscar n’en revenait pas de sa surprise ! Ainsi le mystère était percé ! Son sous-lieutenant s’ornait de ces infâmes rouleaux ! Voilà pourquoi il avait de plus belles boucles qu’elle !
« - Grrr l’imposteur! Le fourbe ! Et dire qu’il prétend que ses boucles sont naturelles ! »

André entendit des pas s’approcher et des voix. Pris de panique, il poussa Oscar et plaqua sa main sur la bouche de son amie, prête à pester mais cette fois contre lui. Il referma le tiroir et l’entraîna dans un placard où il se cloîtra avec elle. Le bruit d’une porte se fit entendre suivi du timbre suave de Girodelle.
« Entrez mon ami. »

Oscar était abasourdie. Quand André sentit qu’elle avait compris la situation, il la laissa à nouveau respirer. Il l’entendit murmurer « Oh mon dieu… ».

Il régnait la pénombre la plus totale dans ce placard encastré dans la chambre du comte. Les deux intrus ne se parlaient pas, de peur de se faire découvrir. Ils attendirent patiemment que les ébats prennent fin. Ils avaient surtout perçu Girodelle gémir mais la femme s’était montrée plus discrète. Au fond, cette situation amusait terriblement André et gênait tout autant Oscar.
Quand ils ne distinguèrent plus un bruit, hormis un ronflement terrible, André se risqua à demander en chuchotant :
« - Au fait Oscar, j’ai bien gagné notre pari, n’est-ce pas ? »
S’il y avait un tant soit peu de lumière dans ce placard, il aurait vu le feu brûler aux joues de la jeune femme.
« - Non ! … Pas maintenant André… On doit d’abord sortir de là… »
Ce fut tout ce que parvint à articuler Oscar. Même dans le noir, André nota son trouble. Il était posté devant la porte du placard et s’apprêta à l’ouvrir lorsque Oscar, ayant eu la même idée, le heurta et se retrouva contre lui.
Au départ elle n’avait pas compris qu’il s’agissait d’André. C’est seulement lorsqu’elle perçut son souffle sur son front qu’elle devina. Les battements de son cœur s’accélérèrent. Elle ne fit pas un geste lorsque la main de son ami se posa sur sa taille, ni lorsque ses lèvres frôlèrent en une caresse sa tempe. Elle resta là, entre ses bras à tenter de contrôler ces sensations nouvelles qu’il faisait naître. Luttant contre elle-même pour s’éloigner de lui… le lieu était mal choisi. Ils risquaient de se faire découvrir et lui…
Un gémissement venait d’échapper à Oscar. André s’était emparé de son cou. Remontant lentement vers son oreille, il lui susurra un mot tendre. Ce délicieux assaut fit rompre ses dernières barrières. Elle chercha ses lèvres et les trouva. D’abord tendre et léger, le baiser se fit plus audacieux. Oscar ne pensait plus… Elle s’abandonna totalement entre les bras d’André.


Ses mains… ses mains l'attiraient toute entière à lui… son souffle s'accélérait… la chaleur de ce corps… son bras droit qui la tenait par les épaules tandis que sa main gauche s'aventurait très au sud de sa taille… elle respirait par saccade… elle suffoquait…
Soudain elle parvint à dégager ses lèvres de l'étreinte non sans regret… respirer, oui elle en avait besoin. D'ailleurs lui aussi avait le souffle court…
Il s'approcha à nouveau, embrassant avec légèreté son cou, ses mains reprenant leurs caresses…
« Ce misérable avait-il juré sa perte ?! pensa-t-elle, jamais ils ne sortiraient de cet endroit !! »
C’est alors qu’elle le repoussa violemment, le manque d’air étant le plus fort. Mais elle n’avait pas réalisé qu’il était adossé à la porte du placard, laquelle s’ouvrit brusquement. André et elle tombèrent au sol à la renverse. C’était la deuxième fois qu’elle se retrouvait contre lui.

« - Hein ? quoi ?? Que se passe-t-il ? » scanda Girodelle tiré des bras de Morphée dans lesquels l’avait amené sa folle nuit.
Très vite, il réalisa la situation, voyant son colonel allongée sur André, la porte de l’armoire grande ouverte et la rougeur sur leurs joues éclairées par la lune blonde…
« - Mais que faites vous là ?! Oscar !! Dans mon placard !!»
Girodelle était hors de lui. Sous ses hurlements, sa compagne au sommeil lourd se réveilla et se redressa…

« - FERSEN !!! »

La surprise était grande pour Oscar et André, qui pour le coup, se relevèrent et regardèrent effarés le lit partagé par les deux hommes.
« - Ô Mon dieu ! Ô Oscar je vous en prie ne dites rien à la Reine… »

La jeune fille était écœurée. Et dire que sa souveraine...avec ce… ce… oh elle ne savait que dire. Elle saisit André - qui était toujours bouche bée - par la main et l’entraîna en dehors des appartements du comte. Ils regagnèrent leurs montures dans le sous bois quand son compagnon partit dans un grand fou rire.
« - Pourquoi es-tu hilare soudainement ? Après ce moment d’humiliation que nous venons de vivre !! »
Oscar était fâchée, honteuse. André lui trouvait cet incident très drôle. Puis, il se souvint de là où Oscar et lui s’étaient arrêtés.
« - D’accord, bon c’est vrai que la situation était gênante pour nous tous. Mais les moments précédents ne me le font pas regretter. »
Il adressa à nouveau un sourire malicieux à sa belle qui affichait toujours cet air furieux. Il s’approcha d’elle, l’enlaça par la taille.
« - Et si nous allions finir ce que nous avons commencé ? » lui demanda-t-il le regard taquin.
Un éclair de malice traversa les grands yeux océans.
« - Oui André ! Excellente idée, on va reprendre là où tout a commencé »
Elle se libéra de l’étreinte et enfourcha sa monture, André à sa suite.

Ils arrivèrent rapidement au château Jarjayes où pas âme ne vivait à cette heure tardive. Oscar laissa son cheval à André et lui glissa :
« - Rejoins moi vite dans ma chambre. »
André était fou amoureux. Il bondissait de joie. Oscar, le regard coquin et rieur monta le grand escalier.

Quelques minutes plus tard, André frappa légèrement à la porte de sa tendre amie. Il avait envie de la serrer à nouveau dans ses bras. De la sentir contre lui, de lui dire combien il l’aimait !
Oscar était assise devant sa coiffeuse.
« - Alors André ? Es-tu prêt à reprendre là où nous en étions ?
- Bien sûr Oscar… »
Il s’approcha pour l’embrasser dans le cou lorsqu’elle se retourna vivement et lui déposa sans ménagement entre les mains un panier rempli de bigoudis.
« - C’est là que tout a commencé André, te rappelles-tu ? Alors au travail ! »


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