Auteur : ray Hits : 1164
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« O Rose thou art sick
The invisible worm
That flies in the night
In the howling storms:

Has found out thy bed
Of crimson joy:
And his dark secret love
Does thy life destroy.”

William Blake, The Sick Rose

Le soir tombe sur les ruines encore fumantes de la Bastille. Traversant comme un fantôme les rues aux pavés abreuvés de sang, la silhouette solitaire d'Oscar fuit les cris de joie et la liesse de ce 14 juillet 1789, pour se réfugier dans le silence écrasant des voutes sombres d'une petite église. C'est là, étendu parmi les dizaines de morts que l'on est déjà venu déposer, que gît le corps de pierre d'André. Vide de toutes larmes et de tout désespoir, Oscar vient doucement se blottir contre lui, embrassant ses lèvres bleues, pour lui confier son dernier message d'amour terrestre.

"Dors, mon André, dors, demain je m'éveillerai à tes côtés. Tu es si beau quand tu sommeille ainsi, si beau que même ton coeur n'ose battre pour ne pas troubler ton repos. Je savais que tu m'attendrais toujours. Maintenant que s'est achevé le combat que nous avions commencé ensemble, je peux venir te retrouver. Au fond si j'y ai survécu, c'est peut-être parce que j'étais déjà morte. Mais il me reste encore une dernière chose à faire, André...
J'aimerais m'endormir la tête sur ton épaule, et recevoir la morsure de la glace qui te recouvre.
J'aimerais sauter du clocher pour m'envoler vers toi quelques secondes, jusqu'à ce que tu me rattrappe.
Mais la mort efface le souvenir de l'amour, elle refroidit nos mains brûlantes et baillonne nos poitrines qui résonnaient si fort, l'une contre l'autre comme un éternel écho. Et dans la poussière de nos tombes, on nous oubliera. Nous ne serons plus que les ombres de deux stèles anonymes, griffant le soleil du crépuscule.
Je ne regretterais pas la vie, André, ce n'est qu'un papillon éphémère, et moi je connaissais déjà la fin de ce sursis. Après tout ta mort nous aura permis de perdre moins de secondes de l'éternité. Et à présent, la mienne marquera au fer rouge nos deux initiales dans la mémoire de cette terre."

Et sur un dernier baiser, Oscar se sépare d'André. Ses traits ne révèlent aucune peur, aucune résignation, juste un regard attendri pour cet homme qui semble dormir aussi profondément qu'un enfant, puis elle s'éloigne, sort de l'église, passe les rues désertes et les barricades abandonnées, en direction de la Seine, mais chaque pas maintenant la rapproche d'André.
Sur la berge, elle se débarasse de ses vêtements, dévoilant son corps blafard à la nuit, et rentre dans le fleuve glacé sans frémir. La lune se miroite en un éclair blanc sur la lame du poignard qu'elle tient à la main. A demi imergée, Oscar tranche la chair pâle de ses poignets, et se laisse tomber en arrière, tandis que son sang se répand en une longue traine rouge sur les eaux.

"Me voilà, André, je vide mes veines de ce poison qui s'appelle la vie. Je laisse mon cadavre à la dérive, souriante et offerte à toi, comme un oiseau aux ailes de sang, pour que tu vienne me cueillir sur les flots noirs.
Mes yeux resteront ouverts pour te guider, et hanter l'humanité en lui criant à jamais ton nom."

FIN
Review Le suicide


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