Auteur : Iria Hits : 959
Lady Oscar > Fic historique > L'ultime Salut >
Ce n'est pas un grand fic, je suis la première à le concéder. Ce n'est pas de la grande écriture ^___^
Voici juste le résultat d'une pensée venue cette nuit.

Si possible, il faudrait la lire sur cette musique (http://membres.lycos.fr/quantz/pages/quantz3.htm )


L'ultime Salut


5 Mai 1789, les Etats Généraux se sont une fois encore réunis salle des menus plaisirs. Ils attendent leur roi, dont le trône est dressé au fond de salle. Son arrivée soulève un cri unique, reprit par un millier de poitrines

« le Roi ! »

Oui, souverain il l’est encore pour quelques jours, pour quelques mois. Mais dès cet instant, son pouvoir ne cessera de décroître. Comment aurait il pu le savoir, cet homme simple dont la bonté ne saurait s’accorder à la charge qui lui fut confiée de par sa naissance ?
Confiant, Louis XVI clôt son discours d’ouverture en se déclarant « le premier ami de ses peuples ». Cette harangue creuse est très applaudie.

Elle seule, restée debout tout le long du discours de l’héritier des Bourbons, n’est pas dupe des mots prononcés.
Elle, c’est Marie Antoinette, reine de France. A peine a-t-elle pali sous son maquillage de cours lorsque son arrivée n’a engendré que le silence. Puis, droite et souveraine elle a traversé le mur hostile de l’assistance muette.

Bon sang ne saurait mentir, Marie ne vacillerait pas sous l’affront comme n’importe quelle femme. Fille de la grande impératrice Marie-Thérèse, elle n’a peut être que trop conscience de sa valeur. On murmure dans les antichambres de Versailles que c’est ce qui l’a perdu, ce qui perd le roi aujourd’hui : Ignorante, futile, coquette, elle a le goût de plaire sans détester non plus de déplaire. Bonne mais hautaine, indulgente mais moqueuse, elle aime à l’excès la parure, le plaisir, déteste la contrainte.
Tout occupés à la haïr, les hommes ont oubliés les qualités qu’ils lui reconnaissaient volontiers dans les premiers temps de son mariage. Elle a le cœur droit, une générosité vraie, une volonté et une énergie qui croîtront avec l’infortune. Les prémices de cette étonnante force de caractère verront le jour dans cette salle même, en ce cinq Mai.

Pour l’instant, la reine s’est enfin assise sur le fauteuil qui lui a été réservé. Les regards qui la couvrent la brûlent, mais elle n’en laisse rien paraître. Assez simplement vêtue d’une robe mauve, sur une jupe de soie blanche, coiffée d’un bandeau de pierreries piqué d’une aigrette de héron, elle reste parfaitement immobile alors qu’un incident éclate dans l’assemblée.
En effet dès que le roi s’est tu, le clergé et la noblesse se sont couverts. Le Tiers a voulu alors les imiter toutefois un brouhaha outré s’est immédiatement élevé. Louis XVI, après un rapide coup d’œil à sa femme, qui ne le lui rendit pas, feignit d’avoir trop chaud et retira sa coiffure.
Il la gardera trois heures à la main. Mais toutes les têtes resteront nues.

Cette anicroche oubliée, l’assemblée reprend son fastidieux travail, ces exhortations sans fin. Alors Marie s’évade, échappe à ce protocole qu’elle a toujours abhorré. Point de petit Trianon ou se réfugier, en ce lieux, mais la reine utilise d’autres artifices. Ses iris couleur de bleuet se couvrent d’un écran de buée, deviennent un miroir privé de vie.
La reine s’en est allée vers des cieux plus beaux, ceux de son passé. Etait il possible qu’une décennie seulement la sépare de sa jeunesse, de ses rires, des heures bénies ou l’idée même d’une révolution était inimaginable ?



Versailles alors brillait de mille feux, sans qu’on puisse se douter qu’il s’agissait en fait du chant du cygne d’une époque à l’agonie.
Et elle… Elle avait été le Nymphalis de cette serre aux papillons, princesse s’enivrant du regard des autres – ces mêmes regards qui l’épinglaient à présent. Comment oublier ces soirs de bals ou les robes à la Française s’envolaient sur les parquets cirés, ou les tailles des cavalières ployaient sous l’étreinte des bras de leurs compagnons de danse, ou les musiques de Jean Philippe Rameau envahissaient les jardins du palais. Comment oublier le regard de Monsieur de Fersen, sous lequel elle se sentait enfin vivante.
Belle comme le jour, la reine avait connu l’apogée de son éclat. Quel artiste n’avait pas souhaité immortaliser son teint transparent, ses grands yeux bleus, son haut front couronné de cheveux blonds, sa bouche plaisante ? Le corps élégant, le cou gracieux, la gorge riche, les jambes longues, les attaches ravissantes ; de sa démarche au moindre de ses mouvements, tout son être n’était qu’harmonie.

Un soir d’été, alors que ses suivantes avaient ouverts les portes fenêtres de sa suite sans parvenir à faire disparaître la touffeur ambiante, elle avait entendu une composition de Johan Joaquim Quantz et en avait été émue. Etrangement, c’est sur cette musique qu’elle voyait à présent se dérouler sa vie

Elle était à l’orée d’un drame, cette femme qui aurait pu être une grande reine si seulement elle avait su pardonner : mais Marie Antoinette tenait d’avantage encore à ses rancunes qu’à ses amitiés. Dotée de cette étrange prescience qui parfois effleure les esprits, l’Autrichienne sentait un gouffre s’ouvrir devant elle, tandis qu’elle se tenait assise dans cette salle à l’air confiné.
Les temps du bonheur, de l’amour et des plaisirs étaient passés, il allait falloir payer ces instants arrachés à la trame tragique de son existence.



Les heures ont passées pendant que la reine caressait les souvenirs d’une époque qui s’effondrait. Il est quatre heures et demie ; l’assemblée est lasse. Louis se lève ; les députés l’imitent dans un cri vibrant :

« Vive le roi ! » Quelques « Vive la reine ! » retentissent aussi.


Que se passe-t-il dans son esprit ? Les historiens diront par la suite que la surprise et la joie ont dicté son geste.
En effet Marie Antoinette, Reine de France, répond alors par une révérence qui lui vaudra une ovation de l’assemblée

Mais l’Autrichienne ne s’incline pas devant eux, ce serait bien mal la connaître. Elle en termine simplement avec ses songes, adresse un dernier adieu à sa jeunesse. Marie a salué une époque qui prenait fin, c’est une nouvelle femme qui se redresse. Dans ses yeux d’eau, une flamme jusqu’à présent absente s’est allumée, le feu du courage. Jusqu’à son dernier souffle ce brasier la portera, lui dictera sa conduite.

Des milliers de personnes ont été témoins de cet adieu. Pas un ne l’a comprit
Review L'ultime Salut


Disclaimer .:: géré par Storyline v1.8.0 © IO Designs 2002 ::. Design adapté par korr