Auteur : Zephirah Hits : 1560
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« L'enfer me jette dans l'effroi, de ses flammes défendez-moi au grand jour du jugement
Pour que j'échappe aux vives flammes, prends ma défense, ô notre Dame, au grand jour du jugement
Toi qui pour nous as tant souffert, viens me défendre de l'enfer Sainte Vierge,au dernier jour . »


Paris.
Urbaine et silencieuse, la nuit s'étendit sur la ville endormie, libérant mille astres lumineux dans les cieux obscurs.
Seul quelques cris aériens, présence de la faune sauvage, rompaient le silence s’étant progressivement installé.
Cette nuit, Ervinca, descendant d’une lignée de seigneurs Italiens, issus de sa Florence natale, posa une main délicate sur le front brûlant de sa femme, dont les lèvres pâles et le visage baigné de sueurs sulfureuses avaient raison de son inquiétude.
Mai la nuit toute entière il veilla, et sa femme accoucha, dans les gémissements dus à l’enfantement, d’une belle enfant aux boucles soyeuses et au visage mutin, aux grands yeux déjà ouvert sur l’immensité du monde qui l’intriguait tant.
Sa mère, belle Française aux manières délicates et au regard bleu, avait épousé un an plus tôt ce doux rêveur qui l’avait conquise et cueillit comme la plus belle des fleures, dans une cour de fêtes fastueuses, de ripailles, et de femmes aux hauts hennis... Un mariage d’amour, au delà des us et coutumes de leur parenté. Du nom De Sarini elle hérita. Le bleu de son regard, typiquement Jarjaye, était le présent de sa mère.

Le jour suivant l’accouchement, la fête battait son plein. Tandis que la cour festoyaient et ripaillaient, Ervinca berçait sa femme, reposante dans son lit entre les coussins moelleux ou elle avait donné la vie, serrant sa fille contre elle. Le fruit d’un amour passionné et interdit.

Chaque année apportait à la jeune fille un soupçon de ses charmes à venir. Quelle belle enfant… Douce et enjouée, s’imprégnant délicieusement des connaissances qu’on lui inculquait. Mais ses pensées étaient préoccupées par l’art, la musique, le seul refuge de consolation. Elle n’était pas fervente croyante, chose qui avait tendance à mettre son père dans de terribles colères. Mais son regard bleu pailleté d’or lui apportait toujours l’assurance de la tranquillité, en cela elle se sentait presque invinscible. Sa force résidait dans sa droiture et son incomparable habilitée à manier les armes, dont son père lui accordait l’accès en sa présence. Seul héritière, elle n’avait de distraction qu’avec le petit garçon de la vielle marâtre, l’ancienne nourrice de son père. Andréas… Bien qu’elle ne parlât pas un seul mot Français, sans ce terrible accent, elle était une charmante vielle femme dont l’exquis talent, en dehors de ses fourneau, voyait le jour devant le feu calme de la cheminée, lorsque enfin son inépuisable imagination prenait corps. Dragons, fée sortilèges nourrissaient les jeux enjoués des deux jeunes enfants, jusqu’à devenir de féroces combats…
De la complicité qui les unissait depuis leur plus jeune âge, naissait un tout autre sentiment, à la fois fort et fragile, qu’ils ne comprenaient pas encore…
Le seigneur chérissait cet enfant, qui apparaissait alors comme le parfait compagnon de jeux pour combler cette solitude qui était une perpétuelle préoccupation. Sa mère avait dû porter en terre plus de 5 nouveaux nés qui n’avaient jamais connu la lumière du jour. Les deux jeunes frères d’Oscar avaient succombés à 1 et 6 ans.

Un soir, par le biais d’une porte entrouverte, elle épiait son père attelé à son bureau. Sans se tourner vers elle, il lui fit signe de le rejoindre. Silhouette gracieuse et souriante, elle s’approcha du fauteuil… de nombreux livres à la reliure de cuir étaient couchés sur son bureau, et quelques contes Italiens, trésors que son père gardait précieusement sous clef, s’exposaient à son regard. Un étrange parfum de myrrhe flottait dans la pièce, tandis qu’elle remarquait les flacons renversés sur une commode. Prenant place sur les genoux de son père, elle inclina sa tête contre l’étoffe précieuse de son pourpoint noir, comme elle le faisait étant enfant, bien qu’à présent jeune fille, elle n’avait honte de rien. Sans qu’elle parvienne à se l’expliquer, le silence de son père confinait leurs précieux instants d’intimité, car leurs yeux discouraient bien plus que leur gorge. Ces instants solennels et sans mots, elle les ne savait les partager qu’avec André, son éternel double de coeur. Lui seul et son père en étaient les bénéficiaires. Lovée dans le creux de son épaule, elle l’écouta lui parler dans la langue chaleureuse de son pays natal. Des plus anciennes favole, dont la légendaire verve familial détenait le secret de sa transmission, aux plus populaires issues folklore paysan vénitien.

Ainsi faisait leur mélopée. Mais le beau tableau, présenté plus haut, ne dura pas. Comme toutes les belles choses ont une fin, celle-ci ne riait pas.
Oscar entamait à présent sa 14ème année. Le château était plus silencieux et plus vide que d’ordinaire. Le personnel n’était présent qu’en infime partie, et un été de tranquillité et de douceur s’annonçait. Mais point de verves inutiles, car voici ce qui arriva.
Le soir, sans doute pris de folie, un groupe « d’hommes » silencieux s’immiscèrent dans le château, non par le sentier semé de cailloux, mais par les jardins, sans doute attirés par leur étrange beauté. Bien que faisant preuve d’une inhumaine discrétion, ils n’échappèrent pas à la surveillance qu’offraient les tours.
Croyant avoir affaire à des brigands de la petite semaine, ou à un groupe de forcenés, Ervinca rassembla le personnel du château, et intima aux deux enfants qu’il aimait le plus tendrement au monde, de courir se mettre à l’abris dans la chambre secrète de son bureau. Une épée luisante battant son flan, sa longue chevelure de jais couvrant son dos comme un précieux étendard, il avait le port d’un homme qui avait l’habitude de se faire obéir.
Seul sa fille suivit ses ordres, privée de choix, elle n’avait pu s’y soustraire. Andréas l’y laissa, et lorsque Oscar voulu riposter, il se contenta de placer un doigt sur ses lèvres. La lourde porte de l’antre taciturne se referma sur elle…

Des heures s’étaient écoulées. Transite de froid et d’inquiétude, elle avait attendu qu’on vienne la chercher, comme on le lui avait ordonné, avec pour seule compagne, l’éternel refrain du silence...
N’y tenant plus, elle sortie de la chambre secrète et se dirigea en grande hâte dans les couloirs éclairés. La panique monta en crescendo…
Vide. Les tapisseries, les tableaux suspendus aux murs, les chandelles d’argent… tout était intact. Rien n'avait été dérobé... Pire encore, toute vie semblait avoir déserté le château.
Elle tourna à un angle et se dirigea vers un couloir opposé, dans un bruissement d’étoffe et de respiration saccadée, elle ouvrit la porte qui menait à la chambre de ses parents…

Le corps de sa mère reposait mollement sur une chaise en bois, la tête renversée sur le côté, sa crinière blonde ondulant impeccablement sur ses ravissants seins pâles. Entièrement nue, sa peau d’albâtre irradiait sous l’orgie des chandelles. Ses yeux bleus, purs joyaux de concision, brûlant autrefois d’un feu d'une vive intensité, étaient rivés au plafond, vides et sans vie.
Oscar ravala sa suintante haine. Cette vision d’horreur eu l’effet d’un coup de poignard dans son cœur. Elle sentie ses jambes se dérober sous son poids, ses ongles s’enfoncer nerveusement dans la chair tendre de la paume de ses mains…et une abominable douleur s’immiscer jusqu'au tréfonds de son âme.

Elle resta ainsi immobile et inexpressive, jusqu'à ce qu’elle n’en puisse plus. Sanglotante, elle attrapa un pan de sa robe pour y enfouir son visage… Son père gisait au pied du lit, la chaude lumière d’un candélabre dessinant les plis sévères de son visage, figés dans l’horreur. Bien qu’il était entièrement vêtu de ses riches apparats lamés d’or, la vision macabre n’en était pas moins ignoble. Le même regard vide, la même couleur d’albâtre de son visage… et deux infimes points rougeoyants dans son cou.

Elle balaya l’air de sa large robe, et entoura son cou de ses bras, comme un serpent enserrant une proie. Les membres rigides et glacés qu’elle porta à sa bouche, enlevèrent le peu de raison qui lui restait, tout comme le chant de son cœur, dont elle ne pu se repaître.
Elle coucha les deux cadavres dans les draps tièdes et douillets du lit à baldaquins, avec une infinie douceur, elle plaça leurs bras de façon à ce qu’ils soient bien disposés le long du corps, et non en croix sur la poitrine. Là, tous deux, ils reposaient. Elle couvrit leurs visages glacés de baisers, et s’arracha à ses étreintes posthumes. Il ne restait nulle trace de ses autres occupants, dont Andréas, qui semblait s’être volatilisé…

Dans un élan de panique, elle emporta le plus d’or possible avec elle, et quitta le château.
La noirceur nocturne comme complice, elle courut le long des jardins fleuris ; Un vent glacé la gifla, mais rien n’aurait pu la sortir de sa torpeur funeste…
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