Auteur :
meridienne
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1. Un crocodile sur un banc de sable
2. Comme le vent se lève...
3. Je vous aime
4. Children of the storm
5. La tombe de l’oiseau d’or.
6. Le chien, le serpent et le crocodile
7. Le dernier dromadaire est mort à midi.
8. Lettres, liasse B
9. Manuscrit H
10. Le singe qui garde la balance
11. 11. Percy et Violet
12. Le Maître des démons
13. La morsure du serpent dans l’œil du faucon
14. La déesse hippopotame
15. Un lion dnas la vallée
16. Jusqu'au lever de Khépri : souvenir et combattre.
17. Manuscrits H
18. Une rivière dans le ciel
19. Le sourire du geôlier
20. La nécropole des singes.
21. Le chant du harpiste
Accoudée à la fenêtre du cab à la française, la voiture hippomobile dans laquelle le cocher était venu la chercher – parce que le Professeur n’aurait jamais permis qu’un domestique conduisît SON automobile - , la jeune femme laissait ses longs doigts graciles jouer avec son médaillon tandis que, le regard perdu dans la nuit nuageuse, elle songeait avec dépit à cet énième rendez-vous galant duquel elle revenait et qui l’avait fort ennuyée.
En cette année 1908, Nefret Forth se trouvait dans un âge auquel la plupart des femmes de la bonne société britannique étaient déjà mariées, voire mères plus d’une fois. Même Lia, la nièce du Professeur, qu’elle aimait comme une sœur, venait de se fiancer à David, leur meilleur ami, alors qu’elle avait tout de même six ans de moins que son amie ! Nefret, à pourtant vingt-quatre ans révolus demeurait célibataire. On l’appellerait bientôt « vieille fille », si cela continuait...
Pourquoi ne parvenait-elle à s’attacher à personne ?
Certes, ce n’étaient pas les prétendants qui manquaient. L’unique héritière de feu l’illustre Lord Blacktower avait pour elle l’intelligence, l’éducation, la fortune... on disait aussi d’elle qu’elle était « l’une des plus belles femmes » de l’aristocratie. Son prénom, Nefret, signifiait d’ailleurs « beauté » en vieil égyptien. Son père avait-il pressenti la joliesse de ses traits à sa naissance ?
Sa longue chevelure bouclée en impressionnaient plus d’un quand le soleil la gorgeait de reflets flamboyants. Ses grands yeux myosotis charmaient tous les regards et on vantait partout la finesse de sa taille et la grâce de ses mouvements.
En ces années-là, pleinement au fait de la récente guerre russo-japonaise, la mode vestimentaire était à l’exotisme oriental. Avec son profond décolleté en « v » façon kimono, la ceinture qui se serrait haut sous la poitrine et la jupe droite qui soulignait la courbe de ses hanches, Nefret avait fait sensation, ce soir au théâtre. Le charme délicat des broderies chinoises de sa tenue avait, disait-on, « rehaussé l’élégance raffinée de la jolie Miss Forth »...
On pouvait bien dire ce qu’on voulait, Nefret savait que la vie trépidante qu’elle menait avec les Emerson ne permettait pas à ses petites formes de dessiner la rondeur harmonieuse de celles de Lia ! Et si l’on admirait la délicatesse de ses gestes (qu’une longue expérience de prêtresse antique, dans son enfance, lui avait inculquée), on s’offusquait qu’elle puisse jurer comme un ânier, préférer les momies à la broderie ou pis, suivre une formation de chirurgien à l’école de médecine pour femmes de Londres !
Bref, tous ceux qui lui laissaient leur carte n’étaient que des fieffés idiots, pédants pour les uns, vaniteux pour les autres, absolument tous déterminés à ne faire d’elle qu’une jolie potiche accrochée à leur bras les soirs de réception...
Pour une femme instruite et indépendante comme Nefret, élevée en liberté dans le désert puis intégrée à la société, était-ce trop demander que de rencontrer un homme honnête et charitable, franc et désintéressé, courageux et volontaire ?
Alors que les murs de brique du domaine d’Amarna House, la propriété des Emerson, bordaient enfin le chemin de terre, Nefret étira un tendre sourire.
Ne venait-elle pas de brosser là le portrait du Professeur ?
Oui, le Professeur Emerson possédait bien toutes les qualités d’un véritable gentleman. Tante Amelia avait eu beaucoup de chance de croiser sa route. Ils étaient rares de nos jours...
Si d’avanture, elle venait à se marier, elle savait qu’elle ne pourrait épouser qu’un homme comme le Professeur ! Il devait bien en rester d’autres.
Les doigts entortillés dans la chaine qui ornait son cou, elle sentit quelque chose lui picoter le pouce à travers ses gants de satin. Baissant les yeux sur le bijou, elle vit que quelques cheveux s’échappaient de la mèche soigneusement emprisonnée à l’intérieur du médaillon.
- Oh non, restez là, petites récalcitrantes, réprimanda doucement Nefret en replaçant les fuyardes en lieu sûr. Que deviendra Ramsès si vous vous évadez ?
Sa main lustra la surface polie de son talisman et Nefret soupira.
Ramsès.
Ramsès était tout autant gentleman que son père. La femme qu’il épouserait serait bien chanceuse...
Le milord cahota sur ses suspensions comme on pénétrait dans l’allée pavée de la propriété. De la lumière illumina le porche d’entrée et un homme au crâne dégarni, en vieille livrée démodée, descendit dans la nuit, parapluie en main, attendre Nefret au pied de l’escalier de granit, afin de l’abriter de la pluie fine qui tombait.
Elle descendit de voiture avant que le cocher n’eût le temps de lui ouvrir la portière.
- Miss Forth !! l’entendit-elle reprocher alors qu’elle venait tout juste de mettre pied à terre.
- C’est bon, Geoffrey, vous pouvez rentrer directement les chevaux à l’écurie. Il fait humide, ce soir, je ne voudrais pas que vos rhumatismes vous empêchent de dormir !
Comme il affichait une mine contrariée, elle le gratifia de l’un de ses charmants sourires et le vieil homme retrouva aussitôt sa bonne humeur.
- Merci Miss. Allez, hop ! enjoignit-il aux deux holsteins noirs qui composaient l’attelage.
La voiture s’éloigna et Nefret gagna la maison en compagnie de Gargery, le majordome des Emerson et « grand-mère » de la famille, ainsi qu’il se plaisait lui-même à se considérer.
- Bonsoir, Miss Forth, salua-t-il rapidement. Je suis bien content de vous savoir rentrée ! Quand j’ai vu que le temps tournait à l’orage, je me suis dit : « Pourvu qu’on ne l’ait pas emmenée dîner en extérieur ! ». J’avais bien noté que votre jolie robe de soirée ne vous tiendrez pas bien chaud en cas de pluie !
- Nous sommes allés voir jouer Roméo et Juliette puis avons dîné dans un très bel hôtel. J’étais tout le temps en intérieur, assura Nefret sans pouvoir contenir un sourire amusé.
Depuis le temps qu’elle connaissait Gargery, elle aurait dû être habituée à ses manières et passer outre, comme Tante Amelia, mais c’était ainsi, il la faisait rire !
Il la mit de tellement bonne humeur après cette sortie mortelle qu’elle eut envie de crier à la cantonade : « Je suis rentrée ! » une fois passée la porte. Mais la bienséance le lui interdisait, aussi respecta-t-elle le silence de la demeure sur le point de s’endormir.
Les Emerson habitaient, dans la campagne du Kent, une confortable gentilhommière. En briques rouges moulées de tournesols et d’éventails, de plan carré et asymétrique, l’architecture permettait de dater l’âge de la maison : nombreux avants-corps, toit à pavillon à frontons-pignons très ornementés, tourelles d’angles rondes, véranda et galeries, la demeure était un modèle parfait du style neo-Queen Anne.
A l’intérieur, les plafonds étaient hauts et sculptés, les murs de bois étaient lambrissés, la décoration était raffinée et surchargée... Tout avait été meublé avec le bon goût de Tante Amelia et même si aucun petit fil ne dépassait du moindre napperon, tout visiteur qui pénétrait les lieux pouvait ressentir la chaleur du foyer que partageaient ses occupants.
Quand elle entra dans le hall, le grand escalier de chêne lui fit face et, dans le carrelage en damier lustré elle put admirer les reflets verts et noirs de la charmeuse de soie qu’elle portait ce soir.
Il était à peine vingt-et-une heure mais l’on avait déjà tamisé les lumières. La jeune femme sut que personne ne se trouvait au rez-de-chaussée, excepté sans doute le Professeur Emerson qui aimait généralement à se retirer dans la bibliothèque, après dîner, pour y travailler à son rapport de fouilles ou sur son « Histoire de L’Egypte ».
Retirant ses pinces, puis son chapeau, Nefret fit le chemin jusqu’à la porte de la bibliothèque. Si elle la trouvait entr’ouverte, elle pourrait frapper pour saluer l’homme qui l’avait élevée comme sa fille. En cas contraire, elle n’oserait pas même signaler sa présence et attendrait qu’Emerson fît bruyamment irruption dans sa chambre, à vingt-trois heures, afin de s’assurer que sa pupille était rentrée seine et sauve.
La porte était entr’ouverte.
Nefret retira les gants blancs qui lui montaient jusqu’au coude, frappa et entra sans attendre de réponse.
La pièce était assez spacieuse. On aurait pu avoir le sentiment d’y étouffer avec les larges étagères bondées de livres qui encombraient une bonne partie des murs mais une large fenêtre donnant sur le parc de la propriété perçait le dernier mur. Un lourd rideau de damas rouge cramoisi – la couleur préférée d’Emerson - habillait la fenêtre.
Le mobilier qui composait cette salle d’études était fonctionnel mais de très bon goût : un bureau et une table de travail en acajou avec leurs sièges assortis qui étaient réservés au Professeur et sur lesquels régnait toujours un désordre monstrueux composé de ses rapports de fouilles, notes d’université, croquis de plans, mines de crayon et vieux rouleaux de papyrus...
Plus loin se trouvait le secrétaire en bois de hêtre laqué de Tante Amelia, parfaitement propre et rangé. En face, près de la cheminée sur le manteau de laquelle trônait un buste de Platon, se trouvaient deux fauteuils-camisole recouverts de velours cramoisi, une table basse et un guéridon. Deux beaux tapis des Indes réchauffaient le parquet et sur les murs lambrissés, le Professeur avait fait accrocher les portraits des êtres chers à son coeur : tante Amelia, bien sûr, qui posait dans la robe qu’il préférait, son frère Walter avec épouse et progéniture qui posaient devant leur propriété du Yorkshire, et Ramsès. Le professeur se plaignait qu’il restait un trou dans le mur, sous le portrait de son fils, et qu’il aimerait y accrocher un tableau de Nefret mais cette dernière avait toujours refusé. Elle n’avait pas la patience de prendre la pose durant des heures. Cette année, pourtant( elle sourit à cette pensée), elle ferait un beau cadeau d’anniversaire à son cher Professeur...
Le Professeur était justement absorbé par ses papiers. Comme souvent, il en avait jeté la moitié par terre et gribouillait de manière illisible sur les autres tout en marmonnant des choses plus ou moins intelligibles. Le nom de Petrie, le seul égyptologue compétent qu’il reconnût dans la profession, revenait souvent dans son baragouinage, flanqué de deux ou trois jurons bien inspirés.
Nefret s’approcha de l’homme et, passant ses bras fins autour du cou puissant, elle déposa un tendre baiser sur sa joue.
- Je suis rentrée, Professeur !
- Hmmm ? fit celui-ci en tournant son visage concentré vers elle.
Emerson n’était pas moins impressionnant assis que debout. Bien sûr, ses six pieds de haut ( presque six pieds et demi !), largement plus grands que la moyenne, forçait immédiatement le respect de ses interlocuteurs. Mais son charisme naturel découlait tout autant de l’ampleur de sa musculature, merveilleusement façonnée au gré des excavations de tombes qu’il fouillait que de l’intelligence et la sagesse de ses traits.
Ses éclatantes prunelles de saphirs, sublimées par la couleur d’or brun de sa peau, vous dissuadaient aisément de rire ou de mentir selon le sentiment qu’Emerson désirait vous imposer.
Connu pour son caractère irascible et impétueux ( les Egyptiens, qui étaient férus de surnoms l’avaient baptisé Abu Shita’im : « le Maître des Imprécations » !), il intimidait même les politiques et les services secrets de la reine !
Cependant, aucune femme, qu’elle eût six ou soixante ans, ne savait résister au charme de son sourire orgueilleux ou carnassier, ni à la séduisante fossette qui ornait son menton volontaire mais qu’il ne fallait jamais (au grand jamais !) appeler « fossette » devant lui mais plutôt « creux ».
- Ah, Nefret ! Quelle heure est-il ? Vingt-et-une heure ? Vous rentrez tôt, c’est bien. Si ce satané Petrie voulait être aussi raisonnable que vous et prendre six mois entier pour publier correctement ses recherches au lieu de faire du travail bâclé ! Voulez-vous dire à votre tante Amelia que je ne montrai pas avant trois bonnes heures ? Bonne nuit, ma chérie.
si le Professeur donna l’impression de faire peu de cas du retour de Nefret, il n’en fallait rien croire. Certes l’ordre de ses priorités étonnait souvent le commun des mortels mais le père aimant qu’il était aurait volontiers sacrifié une année de recherche à William Matthew Flinders Petrie afin de voir rentrer sa pupille à la maison. Il avait même dit, une fois, qu’il préférait abandonner dans le désert son fils de dix ans plutôt que la jeune fille qui en avait alors treize.
Nefret laissa son cher Professeur à son étude et gagna l’étage.
Amarna House contenait huit chambres principales dont quatre se trouvaient au premier étage. C’est là que tout le monde dormait, même si, plus jeunes, Ramsès et Nefret avaient eu leurs chambres au troisième étage, à côté de la nursery.
En avançant dans le corridor, la jeune femme fut surprise de constater qu’il n’y avait pas de lumière dans la chambre de Daria. D’ailleurs, il n’y avait pas de Daria non plus, la porte étant restée grande ouverte.
Nefret fronça les sourcils.
La demoiselle dont il était question n’avait que seize ans. S’il était étonnant de penser que les autres pussent être déjà couchés, il était aberrant d’imaginer que elle, ne l’était pas !
Daria était une orpheline que les Emerson avaient rencontrée au printemps dernier et qui, après avoir partagé leur impensable aventure dans la civilisation reculée du désert du Soudan où avait justement grandi Nefret, avait suscité la compassion de la famille. Ramsès avait d’ailleurs étonnement insisté pour la ramener avec eux. Le Professeur lui avait offert son toit en attendant qu’elle trouvât à se placer dans la région. Elle était jolie, maligne, débrouillarde et sympathique. Nefret ne doutait pas qu’elle trouverait une offre de femme de chambre ou de bonne d’enfant dans quelque famille aisée du coin.
Mais pour cela, il fallait d’abord qu’elle apprît à obéir aux consignes : que faisait-elle hors de sa chambre à une heure tardive pour une jeune personne en besoin de sommeil? Et où, par Isis, pouvait-elle se trouver ?
Elle décida d’aller voir sa tutrice. Si Daria était debout, la seule raison légitime qu’on pouvait lui accorder était d’être en compagnie de Tante Amelia. De toute manière, elle se devait d’aller souhaiter le bonsoir à cette dernière avant de gagner ses propres appartements. Mais Daria n’était pas avec Tante Amelia qui était occupée à traduire l’un de ses fameux contes égyptiens.
Un peu perplexe, vaguement contrariée envers la demoiselle qui, par les aises qu’elle avait tout de suite prises à Armana House, avait tendance à agacer Nefret, la jeune femme s’engouffra plus loin dans le couloir, jusqu’à la chambre du fils des Emerson.
Peut-être y trouverait-elle Daria ? Ce qu’elle n’espérait pas vraiment, sentant que cela la contrarierait davantage. Non seulement parce qu’elle n’arriverait pas à trouver du travail si Ramsès l’encourageait dans sa désobéissance mais cela renforcerait l’impression de complicité que Néfret ressentait lorsqu’elle observait Ramsès plaisanter avec Daria...
Ramsès plaisantait rarement avec qui que ce fût et bien qu’il semblait clairement avoir pris la jeune fille sous son aile, le voir trop attaché à elle... dérangeait Nefret.
Parvenue à la porte de la chambre, Nefret tourna la poignée et entra comme si les lieux avaient été les siens. C’était une habitude qu’elle avait acquise depuis l’enfance, que Ramsès lui avait prié de perdre voici plusieurs mois( sans doute pour se venger du fait qu’à la majorité de Nefret, il avait dû commencer à la vouvoyer alors qu’elle continuait de le tutoyer. Ramsès avait toujours été susceptible quand on lui parlait de son âge et acceptait mal l’idée de rester « garçon » quand Nefret était devenue « femme ») et à laquelle elle avait du mal à renoncer.
Ce soir-là, elle regretta son manque de bonne volonté. La scène à laquelle elle assista la bouleversa tout comme elle apprit pourquoi son frère adoptif avait réitéré sa demande avec insistance depuis leur retour du Soudan.
Daria était effectivement ici. Mais bien différemment du temps où c’était Nefret qui boudait les heures de couvre-feu pour se faufiler dans la chambre du jeune homme, Ramsès et Daria ne causaient pas gentiment, lui n’était pas assis, chaise renversée, devant son bureau et elle ne se trouvait pas assise en tailleur sur le lit.
La situation était autrement plus incroyable.
Au milieu de la pièce faiblement éclairée par une seule lampe à pétrole, le canapé de Ramsès accueillait son propriétaire. Assise à califourchon sur lui, Daria, en linge de corps, délassait son corset, aidée dans sa tâche délicate par les mains agiles de Ramsès qui, lui, avait perdu sa chemise.
Nefret crut être prise de vertiges. Sa bouche s’assécha, son souffle se coupa, elle resta finalement paralysée, sa main crispée sur la poignée de porte, incapable d’articuler un mot ou de détourner les yeux. Pendant ce temps, le couple eut le temps de la remarquer. Ramsès se redressa et Daria attrapa sa robe de chambre (car son corset délassé commençait à tomber).
- Vous avez oublié de frapper, fit simplement remarquer Ramsès, sans honte ni culpabilité aucune dans la voix.
Au contraire, il semblait lui faire un reproche. Cela rendit la parole à sa sœur.
- Daria, tu retournes dans ta chambre ! Maintenant ! ordonna-t-elle comme la jeune insolente ne bougeait pas d’un doigt.
- Il faudra faire mieux que ça, Nefret, eut-elle l’audace de répondre, plantant ses prunelles noisettes dans le regard furieux de son interlocutrice. Il me semble que, de nous deux, c’est vous qui êtes de trop, ici !
Nefret, hors d’elle, allait répliquer mais Ramsès posa une main caressante sur l’épaule de son... amante ( ?!!!!!!) :
- Laisse-nous, s’il te plait. Le moment semble venu de tout révéler.
Plus conciliante avec lui qu’avec celle qui était presque vieille fille, Daria obtempéra et quitta les lieux en prenant soin de fermer la porte derrière elle.
Nefret marcha alors à grandes enjambées vers le coupable pris en flagrant-délit et profita de ce qu’il avait les deux mains prises dans la chemise qu’il enfilait pour lui décrocher le plus mémorable des coups de poing qu’elle n’eût jamais donné.
Elle poussa un cri quand ses os cognèrent contre la mâchoire virile mais si sa main meurtrie la lança vivement après le coup, elle fut satisfaite de voir un mince filet de sang jaillir de la bouche de l’infâme.
Si Ramsès avait eu mal ( et il dut avoir mal car elle l’avait vu grimacer !), il ne protesta pas. Tranquillement, il finit de boutonner sa chemise, tandis que Nefret haletait, la colère loin d’être retombée. Puis, il passa sa main sur ses lèvres pour éviter que le sang ne gouttât sur son vêtement.
- Si j’avais dix ans de moins, je penserais que vous venez de me corriger pour une faute que j’aurais commise ! commenta-t-il légèrement amer.
Nefret trépigna.
- « Une faute » ? Mais bien sûr que tu viens d’en commettre une ! Nom d’un chien, Ramsès !! Qu’est-ce qui t’a pris ?!! J’imagine que tu n’as pas la moindre idée de ce que tu allais faire avec elle !!
- J’ose espérer que j’en avais une idée un peu plus précise que vous, répliqua-t-il sombrement.
Nefret blêmit avant de repartir dans une rage encore plus folle. Ramsès ne lui avait jamais parlé de la sorte ! Etait-il réellement fâché de son intervention ? ne comprenait-il pas la situation ? Elle fit quelques pas dans la chambre pour se calmer avant de reprendre :
- Je n’en crois pas mes oreilles ! Ramsès... Sais-tu quel âge a cette fille ?!!!!
Il s'oublia au point de manifester sa surprise par un haussement de sourcills, avant de les froncer, gagné lui aussi par la colère :
- J’espère que vous ne sous-entendez pas... De quoi m’accusez-vous, Nefret ? Elle a parfaitement l’âge !
Néfret secoua la tête, agacée :
- Bien sûr qu’elle a l’âge, il ne s’agit pas de ça ! Mais tout de même, elle est très jeune ! C’est encore une enfant qui...
A bout de patience, elle éclata :
- Crénom, Ramsès !! Es-tu à ce point stupide de vouloir faire ça avec elle ?!!! Tu peux avoir toutes les femmes que tu veux et toi, il faut que tu te jettes sur cette enfant ?!!!
Impassible comme jamais, Ramsès ne broncha pas. Il se contenta de demander :
- Encore une fois, Nefret, que me reprochez-vous exactement car vous n’avez pas justifié votre geste passablement douloureux.
« Passablement douloureux » ? Nefret foudroya Ramsès du regard. Sa main la brulait tellement qu’elle mourrait d’envie d’aller la plonger dans le puits de la cour. Voulait-il qu’elle le frappât avec quelque chose de dur et de lourd pour voir si elle pouvait faire mieux que « passablement douloureux » ?
Cet idiot était borné comme un âne ! Que devait-elle dire pour qu’il réalisât les implications de son acte ?
- Ramsès, tu ne connais donc pas les femmes ? A seize ans, elles sont naïves et romantiques, même Daria qui a pourtant eu la vie dure ! Surtout Daria, enchaina-elle, réalisant le passé sombre de l’adolescente. Tu l’as déjà sauvée, tu es son héros ! Si tu te montres tendre avec elle, elle va certainement penser que tu l’aimes !
- C’est le cas.
Le ton égal de Ramsès démangea furieusement l’autre poing de Nefret.
- Espèce de... vociféra-t-elle en levant le bras, déçue et blessée que Ramsès eût si peu de considération pour les femmes qu’il mettait dans son lit.
Le comportement de son frère était odieux, horrible ! Indigne de lui ! Et dire que moins d’une heure auparavant, elle avait osé le comparer à un gentleman !
Elle voulut évacuer sa rancœur, elle cogna de toutes ses forces. Mais elle était trop agitée pour viser juste. Sa main vint frapper la paume de l’homme qui lui maintint fermement le poignet.
- Laissez-moi poursuivre, pria-t-il en prenant des accents d’autorité. Je suis peiné de constater que vous pensiez que j’ai eu un comportement cavalier envers Daria. Je ne l’ai pas touchée par simple désir. Et si elle pense que j’ai des sentiments pour elle, c’est que c’est le cas ! Maintenant, vous devriez aller vous coucher, Nefret. Vous êtes vraiment de très mauvaise compagnie lorsque vous rentrez déçue d’un rendez-vous galant !
Cette nuit-là, Nefret dormit mal. Pas à cause des cauchemars qui troublaient d’ordinaires ses songes. Mais en raison des mots qu’avait prononcés Ramsès.
Il était amoureux...
Cela ne lui était jamais arrivé ! Et sans comprendre pourquoi, cela inquiétait Nefret. Cette révélation la mettait mal à l’aise. Il était son petit frère, il était un enfant ! Il était encore trop jeune pour être amoureux !
Dans sa tête, des mots résonnèrent. Ils semblaient provenir d’un discours entendu jadis... :
« Ne regarde pas les hommes. Ne cherche pas à les aimer. L’amour est effrayant. Il brouille les esprits et sépare les familles. L’amour est redoutable, l’amour dévore. Beau et dangereux, il ressemble à Sobek... L’amour est comme un grand crocodile étendu sur un banc de sable ».
Nefret ne savait plus d’où venaient ces mots mais... Ramsès semblait marcher imprudemment vers le crocodile.
Cherchant son médaillon au bout de la chaîne qu’elle ne retirait jamais, Nefret murmura quelques mots des vieilles prières égyptiennes qu’elle connaissait.
- O puissante Isis, conclut-elle après sa récitation, protège-le !
A suivre...
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