Note de l'autrice :
C'était une belle après-midi de juin, un ciel bleu sans nuage... Bref, il faisait chaud, très chaud... Et quand il fait chaud, il me vient parfois des idées bizarres.
Quand il fait froid aussi d'ailleurs... Et quand il pleut ou qu'il neige... Et... :-D
Bonne lecture !
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- André, ronronna Oscar en se blotissant contre lui.
Le cœur du jeune homme fit un bond dans sa poitrine. La tendresse de l’ancien colonel l’émouvait à tel point qu’il en avait les larmes aux yeux.
- Oui Oscar, répondit-il d’une voix enrouée en posant sa joue sur la soie de ses cheveux d’or.
Elle releva la tête, intriguée par cette voix hésitante. Il perçut alors dans son regard circonspect une interrogation angoissée qu’il n’arrivait pas à déchiffrer.
- Tu m’aimeras toujours ? finit-elle par demander, comme elle aurait commandé le « garde-à-vous » à ses soldats.
Il soupira malgré lui, entraînant derechef un froncement de sourcils chez sa compagne. La moue de la belle se fit boudeuse. Il se retint de sourire. Elle était si adorable dans l’écrin de sa féminité enfin acceptée. Elle fronça le nez et il dut se faire violence pour ne pas fondre sur ses lèvres. Les prunelles émeraudes brillèrent subitement d’une telle gourmandise qu’Oscar détourna les yeux en rougissant.
- Alors ? repartit-elle néanmoins à la charge.
Un voile de contrariété recouvrit le visage d’André.
- N’ai-je point assez prouvé à quel point je t’aimais ? Mon cœur n’a-t-il pas assez soupiré ? Mon âme pas assez saigné ?… Dis-moi Oscar, que puis-je faire pour te prouver que je t’aime, que je t’aimais et que je t’aimerai toujours ?!… Dis-le moi !!
André était maintenant fâché. Ce n’était pas la première fois qu’elle lui posait la question, et il commençait à se demander si elle ne doutait pas de lui…ou si elle ne se lassait pas. Au lieu de se calmer, l’irritation de son partenaire enflamma Oscar.
- Tu pourrais commencer par ne plus être béat d’admiration devant Selena ! l’accusa-t-elle.
- Mais…tu divagues, protesta-t-il, éberlué.
Ce qui eut le don de faire sortir Oscar de ses gonds. Elle se dressa devant lui comme la statue du Commandeur. Mais une statue furibonde et prête à se battre !
Désemparé, André regardait la jeune femme sans réagir, une lueur d’incompréhension tapie au fond de ses prunelles.
- Oscar… C’est un ange…
- Et alors ! A chaque fois qu’elle bat des ailes tu la regardes bouche bée, lui reprocha-t-elle avec une grimace signifiant son écoeurement.
André cilla, complètement perdu devant la colère d’Oscar. Elle ne pouvait être jalouse d’un ange, c’était inconcevable…
- Voyons Oscar, tenta-t-il encore de la raisonner en se moquant gentiment comme il le faisait lorsqu’ils étaient enfants, tu sais bien que les anges n’ont pas de sexe…
- Et c’est tout ce que tu trouves à répondre !! rugit-elle en coupant son plaidoyer. Que dirais-tu si je bavais d’admiration à chaque fois que Raphaël bat des ailes ?
- Je l’appellerais Fersen ! s’écria André, heureux de constater que, pour une fois, c’est elle qui accusait le coup.
- Ce n’est pas bientôt fini ! tonna saint Pierre d’une grosse voix. Encore en train de vous disputer. Si vous continuez de la sorte, je vous envoie en bas !
Oscar et André s’enfoncèrent dans un silence boudeur, se jetant mutuellement des regards accusateurs.
Tout-à-coup, un génie noir, ailé et cornu apparut à côté de saint Pierre.
- Dîtes, le Maître n’en veut pas en bas, dit-il avec soulagement. Il dit que ces deux-là seraient capables de mettre l’enfer à feu et à sang.
Saint Pierre ferma les yeux, un rictus de désespoir mollement accroché à ses lèvres. Même le diable n’en voulait pas !
- Pourtant, le feu et le sang, c’est plus votre domaine que le nôtre, tenta-t-il néanmoins de plaider.
- Pour les âmes damnées oui ! riposta le génie messager. Mais là, c’est tout le royaume qui serait touché… Non non, vraiment ! On préfère les suivre de loin. Gardez vos blanches brebis au paradis, c’est leur place.
- Blanches brebis, c’est à voir ! rebondit saint Pierre. Ils sont commis le péché de chair. Ce sont des ivrognes qui se battent sans arrêt. Lui est gourmand et elle est orgueilleuse. Ce ne sont pas vraiment des oies blanches !
- Tatata ! Ils ont gagné leur paradis, alors vous les gardez !
Saint Pierre et le génie jetèrent un regard aux intéressés et s’immobilisèrent. Choqués, révoltés, et plus amoureux que jamais, Oscar et André faisaient front commun. Les bras croisés, les sourcils froncés, les lèvres pincées, ils fixaient de leurs prunelles ombrageuses le saint et le messager infernal.
- Bon, je vais redescendre, se défila le génie en disparaissant comme il était venu.
- Ah, je crois que l’on m’appelle à l’entrée du paradis, se réjouit saint Pierre en s’éclipsant aussi rapidement que possible.
« Il va falloir que je dise au Seigneur de recalibrer sa balance des âmes. L’existence au paradis va bientôt devenir infernale !… » pensait-il en triturant ses clefs et en secouant la tête.
- Tu crois que je n’ai pas ma place ici ? demanda Oscar d’une voix vibrante de tristesse retenue, en plongeant ses prunelles brillantes dans la prairie apaisante des prunelles d’André.
- Oscar, comment peux-tu douter ? Tu es un ange de lumière. C’est ce que j’ai pensé la première fois que je t’ai vue…et tu ne m’as jamais donné matière à changer d’idée. Je t’assure Oscar, que si le paradis était refusé à une âme aussi belle que la tienne, alors plus personne ne pourrait y entrer !
- Oh André, André… Le paradis, c’est d’être à tes côtés.
- Oscar…
Leurs lèvres s’unirent dans un baiser à la fois empreint d’une passion dont Cupidon était très fier, et d’une douceur rappelant les plumes des anges.
- Il n’empêche que la prochaine fois que tu souris bêtement en admirant Selena, je t’arrache le cœur, le prévint-elle en roucoulant.
- Idiote ! Il est déjà en ta possession…
FIN |