Oscar referma doucement la porte de sa chambre et s’appuya contre le battant de bois quleques instants. Elle ferma les yeux et poussa un profond soupir. Un soupir fait de toutes les émotions qu’elle avait ressenties ce soir. Des émotions de femme. Elle quitta le soutien réconfortant de la porte et s’avanca dans la pièce faiblement éclairée par un chandelier posé sur sa table de toilette. Elle s’assit lentement sur son tabouret comme pour ne pas troubler la douce rêverie de cette soirée si particulière.
“Oh Fersen. Que ne serais je capable de faire pour vous? Pour votre amour?”
Son regard accrocha son reflet dans le miroir qui tronait sur la table de toilette. Elle n’en revenait toujours pas de se voir ainsi : maquillée lègerement mais avec art de manière à réveler sa beauté, ses cheveux savamment relevés retenus par un diadème délicatement orné qui retombaient en boucles souples depuis le sommet de sa tete en encadrant son visage aux traits fins, cette robe féérique enfin que Grand Mere avait enfin réussi à lui faire porter. Elle souriait à son image aussi troublée par la prise de conscience de ses charmes si féminins que par le souvenir de la fierté de sa si persévérante nourrice à voir sa petite Oscar si belle en robe du soir. Oscar entreprit de commencer à se démaquiller, dissolvant ainsi par petites touches ce rêve eveillé qu’elle venait de vivre dans les bras de Fersen. Il avait paru subjugué par sa beauté, semblant en oublier son tendre penchant pour la Reine, il avait vanté sa beauté, sa grâce… les attraits de cette femme qu’il serrait dans ses bras en la faisant tournoyer au rythme d’un menuet. Comme il était doux ce regard troublé par le désir…
L’artifice quittait peu à peu le visage d’Oscar, plus de mascara, plus de fard, plus de poudre, plus de rouge à lèvres. Seulement le visage d’une femme aux prises avec ces démons qui envahissaient sa vie depuis le jour où elle avait choisi de vivre une vie d’homme.
“Oui Fersen m’a trouvée belle, je l’ai troublé en tant que la belle inconnue d’un soir. Par ailleurs il m’a confié son admiration pour le colonel que je suis, pour mon choix de vie. Mais jamais il ne fera le lien entre ces deux facettes qui ne forment pourtant qu’une personne : moi… Comment le revoir à présent et ptéserver ce secret? Il faudra que je veille à ne pas me trahir. Fersen ne connait qu’une Oscar son amie, sa confidente, le colonel. Pourtant je l’aime et depuis ce soir je crois que je pourrais un jour le séduire en redevenant une femme; le seduire quel mot étrange à mes pensées. Moi séduire un homme alors que je me suis jurée d’être le plus impitoyable d’entre eux!!
Non Fersen aime les femmes belles et fragiles, pas celles qui comme moi courent la campagne jusqu’à épuisement, pas celles qui croisent le fer, pas celles qui suivent leur chemin dans l‘honneur quitte à commettre des erreurs, à se mettre en danger pour rester fidele à ce qu’elles sont .Pourrait il aimer une femme soldat, avec un corps porteur des marques de ses combats, désirer un corps plus entrainé à endurer des combats qu’à s’abandonner. Allons Oscar tu t’abreuves de chimeres! Tu te saoules de ces moments fugaces où tu es devenue une autre. Mais cette inconnue n’est pas toi!! Réveilles toi! Tu t’es donné un étourdissement à ce philtre d’amour que Fersen a versé dans ton coeur mais ce n’est qu’illusion. A ses yeux tu seras toujours le colonel de Jarjayes …“
""...Sous le maquillage que dessine l'amour, est ce que j'aurai le courage de plaire encore un seul jour. Si ce n'était pas lui, tout ces mots qu'ont a bu, est ce qu'on me dirait oui ou l'ivresse a-t-elle disparue ? Est ce qu'on pourrait encore parler de mon sourire et faire de mon corps le premier de ses désirs ?Ce peut-il que l'on m'aime, qu'on pardonne mes fautes est ce que je serai la même dans les yeux d'un autre...""
Oscar enleva le diadème et défit ses cheveux un peu plus brusquement qu’elle ne l’aurait voulu. Les griffes qui permettaient à la parure de se fixer s’emmêlèrent à ses cheveux, ce qui eut pour résultat un nœud et par la même occasion de l’agacer. Décidément le tempérament de feu de la jeune femme ne réussissait pas longtemps à rester caché sous l’attitude lisse d’une dame de cour.
« A quoi peut bien m’avoir servi de me farder ainsi pour changer le regard que le comte pose sur moi ? Qu’y ai je gagné? Certes j’ai vu l’admiration dans ses yeux mais à présent je sais que même si je le séduis un jour il ne me regardera jamais comme il regarde la Reine ; non jamais. Je suis perdue. Mon Dieu quel chemin dois je prendre ? Quel troublant destin que le mien ! J’ai passé toute ma vie à courir sans m’arrêter pour construire cette carrière militaire brillante pour laquelle mon père m’a élevée toute mon enfance, aux cotés d’André et lorsque je m’arrête je ne sais plus que faire ? Bien sûr ce dilemme m’accompagne comme un ami fidèle, depuis des années, mais aujourd’hui je me sens comme écartelée, comme un pantin. Mon sens du devoir, ma combativité et cette liberté dont je jouis en vivant comme un homme suffiront ils cette fois ci à me sauver, à faire revivre l’Oscar que tout le monde connaît ? Enfin pas tout à fait tout le onde…Seul André sait qui je suis vraiment…
""...Je ne pense pas à mal, quand mes doutes s'exposent, un sentiment normal quand on est une femme je suppose...""
Apres s’être battue avec ses cheveux et son diadème pour les séparer Oscar entreprit de se dévêtir, elle se regarda encore une fois dans le miroir, elle avait encore les cheveux en bataille, mais elle nota la finesse de son cou, la ligne de ses épaules, le doux renflement de sa poitrine, la taille fine, elle sourit une dernière fois à la femme qu’elle aurait pu être et commença à délacer son corset et les rubans qui fermaient sa robe. Elle se saisit de sa brosse et commença à lisser doucement les longues boucles d’or de ses cheveux.
« Je revois sans arrêt le regard de Fersen et celui André, ils tournent dans ma tête comme un carrousel sans fin. André, je revois encore ton air ébahi quand tu m’a vue en haut du grand escalier. Je suis passée à coté de toi sans te regarder. Toi de qui je n’avais jamais fuit le regard avant. Je suis descendue fièrement en regardant droit devant moi. Que ne voulais je pas voir ? Ton regard qui aurait pu moquer ma démarche maladroite dans ces vêtements de femme qui me sont si étrangers ? Ta surprise qui aurait pu ébranler le peu de confiance en moi que j’avais à cet instant? Cet éclat étrange dans tes yeux ? Ce trouble que j’ai déjà surpris dans un regard indéchiffrable posé sur moi en de rares occasions ? Que veut il dire ce regard si tendre ? Personne ne m’a jamais regardé comme tu le fais. Non personne. Pourquoi ? Oh André je sens bien que mon attitude envers Fersen te peine. Nous avons été proches toute notre vie. Sans doute es tu jaloux de cette complicité qui nous échappe depuis que Fersen est devenu pour moi plus qu’un ami? J’avoue qu’elle me manque aussi notre amitié. Or je ne veux pas te perdre, jamais ! Si Fersen est plus qu’un ami cela veut dire qu’il compte plus que toi ? Comment le pourrait il ? »
""...Si jamais je le perd parce qu'on se perd parfois. Est-ce que je pourrais plaire ? Est ce que je pourrais dites moi ?Est ce qu'on pourrait encore parler de mon sourire et faire de mon corps le premier de ses désirs ?Ce peut-il que l'on m'aime, qu'on pardonne mes fautes est ce que je serai la même dans les yeux d'un autre...""
« Quel cheminement bizarre que celui de mes pensées ? Je devrais être encore en train de rêver à Fersen, à ses mots tendres, à ses bras autour de moi, à son regard … et me voila en train de penser à André. Après tout il est certainement le seul à me voir telle que je suis vraiment. Ni un homme impitoyable et droit, ni une femme fragile mais un être humain à mi chemin entre les deux. Tantôt forte, tantôt faible, parfois rieuse et parfois mélancolique. Pardonnant mes colères, oubliant les coups dont je l’ai roué car c’était mon seul exutoire à la peine d’une enfant puis d’une jeune fille en proie au doute. En serait il de même si nous nous rencontrions aujourd’hui sans avoir passé nos vies ensemble. Me suivrais tu aussi aveuglement, où que j’aille, qu’elle que soit la tache à accomplir ? Partout ? Toujours? Poserais tu sur moi ce fameux regard qui me réchauffe et me rassure ? Oh André je souhaite ne jamais te perdre. Cela ferait trop mal, beaucoup plus mal que cette douleur que me cause Fersen je le pressens, je le sais …Je prie pour être aussi unique dans tes yeux que tu l’es dans les miens… »
""...Est-ce qu'on pourrait me suivre pour un regard dans la rue ? Me dire que l'on veut vivre avec moi l'inconnu ?Qu'on me dise que l'on m'aime, que l'on pardonne mes fautes ...Est-ce que je serai la même dans les yeux d'un autre ?Ce peut-il que l'on m'aime, qu'on pardonne mes fautes ...Est-ce que je serai la même dans les yeux d'un autre ?...""
Soudain Oscar rougit, non pas du cheminement de ses pensées, encore que… mais du fait que toute occupée à laisser son esprit libre de vaganbonder elle en avait oublié qu’elle était encore nue. Pour se coiffer elle était demeurée nue… C’était bien la première fois qu’elle ne se précipitait pas sur un vetement pour cacher ce corps tant de fois renié.
FIN |