Auteur : Eon Hits : 986
Fictions Originales > Romance > Tout ce qu'on ne se dit jamais... > Ajouter chapitre à Tout ce qu\
"Cessez de bouger Monsieur! Nous n'arriverons jamais à finir ce gilet à temps!!
- Mais vous me faites mal, bon à rien!! Ah, si je n'étais pas si pressé je vous rosserais bien!!"


Le tailleur planta l'ultime aiguille dans le tissus bleu du costume trois pièces, et poussa un soupir de soulagement. Debout sur un tabouret, un jeune homme élancé d'une vingtaine d'année, grognait, injuriait, marmonnait insultes et réprimandes contre le pauvre homme qui se faisait jurer de ne plus prendre une seule de ses commandes!

Le garçon se débarrassa prestement du gilet galonné d'argent, et alla vite se rhabiller en endossant son costume de soie de Lyon. Dans l'arrière boutique, tout près des amoncelas de rubans clairs, les servantes épiaient le jeune homme avec des yeux énamourés, buvant ces traits si fins et ces yeux si froids avec un désir presque sadique.

D'un mouvement méprisant, le jeune homme jeta une bourse pleine sur le comptoir, puis partit hors de la boutique en resserrant le ruban bleu de ses cheveux et enfoncant un tricorne noir sur sa chevelure blonde.
Au dehors, il fit claquer sa canne à pommeau d'or sur le pavé de Paris, là où passaient les carrioles et les carrosses dans un roulement de sabots et d'éclats de voix. Il se mit à avancer parmi les passants, souriant des regards qu'on jetait sur son passage, repoussant les oies blanches qui s'arrêtaient devant lui, et continuait sa route d'un air tranquille.

Paris en été, était radieuse comme l'innocence. Les oiseaux s'envolaient dans le ciel près du parvis de Notre Dame, les Quais de Seine grouillait d'un joyeux monde, et personne ne se souciait de cette forme pâle qui se mouvait parmi la foule, qui regardait sans sourciller l'arracheur de dent, ou qui écoutait les nouvelles près de l'arbre aux journalistes. La fête continuelle de Paris ravisait les oreilles du jeune hommes, qui retira son tricorne en dévoilant son éblouissante chevelure d'or. Ses grands yeux clairs planèrent sur la Seine, il s'accouda à un pont, tournant le dos aux enfilades de jolies maisons et aux cafés regorgeant de filles aux bonnets fous, et contempla le fleuve et ses eaux vertes, tournant la tête comme pour apercevoir le fond de l'eau.


"Monsieur Axel! Monsieur Axel!"


Le jeune comte poussa un soupir exaspéré, une grimace s'arrachant à son visage il y a un instant si paisible. Les traits crispés, il entendit les pas précipités de son domestique qui accourait vers lui. Essoufflé, le valet s'arrêta devant son maître, et Axel se tourna d'un air impassible vers l'homme qui hoquetait, rouge d'avoir tant couru.
Sourcil haussé, il le toisait d'un air méprisant.


"Qui t'as envoyé?
- C'est... C'est Mademoiselle d'Hataysse...
- Qu'elle aille au diable!! s'emporta-t-il.
- Mais elle insiste, monsieur et...
- Et bien qu'elle insiste! Mais je ne viendrais pas! J'ai d'autres projets que les beaux yeux de Madame!!"


Furieux, il fit volte face, s'enfonça son tricorne sur la tête, et empoigna sa canne d'une main ferme. Puis, il s'élança hors de la vue haletante du domestique, qui ne se risqua même pas à le rattraper. Essayer de rattraper ce jeune comte Gascon était se tuer le coeur et la santé... Il pouvait disparaitre comme il apparaissait, s'en était effrayant!

En réalité, nulle magie à cela, Axel de Mondenard avait toujours couru dans sa jeunesse. Couru pour échapper aux gifles de son père, couru pour quitter une jolie fille, couru pour en rattraper une, couru pour semer son ami Brissac... Bref, sa vie n'avait été qu'une suite de cavalcades effrénées, et même à Paris le jeune comte devait s'y plier! Ainsi, il parcourait les dédales de ruelles en bousculant les passantes et les piétons, sans s'en préoccuper plus que ça.

Il avait tellement oeuvrer pour monter à Paris, voici que même ici on l'obligeait à courir!

Quand il vit qu'il l'avait semé sans peine, il poussa un soupir de soulagement, et passa sa canne sous son bras pour marcher tranquillement à travers le Marais.



Axel de Mondenard était né pour vivre à Paris, pour être un Parisien. Il le savait, et l'avait toujours su. En Gascogne, il s'était tué la santé et la jeunesse à voir défiler les récoltes de ses terres, à voir son père se glorifier d'une bonne saison, et sa mère le féliciter de cet exploit. Lui, des champs, des paysans, il n'en avait cure, qu'ils aillent tous crever ou qu'ils aillent voir ailleurs! Son bonheur n'était pas ici... Il ne voulait pas, il n'avait jamais voulu de cette vie monotone à voir les sacs de blés lui germer sous le nez, ou bien ces stupides tournesols qui se tournent vers le soleil comme des moutons suivant leur maître...

Et à présent, à présent il était à Paris, et il était chez lui. Il était de toute les mondanités, de tous les bals, on se l'arrachait, on se le partageait... Il était si beau, si frivole, il avait ce ton sarcastique que tout un chacun adore ici à Paris! Sa langue qui claque contre son palais, ses yeux qui se lèvent avec indolence, sa gestuelle dédaigneuse et ses moues insolentes et rebutées qui conviennent si bien à son jeune âge...


"Ah! Mais c'est notre cher Axel!!!"


Il se raidit. Oh, non... Non.... NON!!!


"Vous ne reconnaissez même pas vos chères amies?"


Mon Seigneur, ai-je le droit de vous maudire?
Il serra les poings, serra les dents, et fit volte face en une somptueuse pirouette, vers deux brunettes qui le buvaient du regard.


"Mes chères petites! Aneline, Laure! Toujours aussi ravissantes!"


Il leur décrocha le plus ravageur de ses sourires hypocrites, et leur baisa la main. Aneline et Laure étaient les deux petites soeurs de son meilleur ami, Valentin Le-Blanc, un riche fils de financier enrichi sous le règne des frères Paris. Par cordialité pour son ami, Axel s'efforçait d'être aimable avec ses deux insupportables cadettes, qui prenaient un malin plaisir à s'accrocher péniblement à lui.


"Nous accompagneriez-vous chez notre mère chère Comte?
- Navré, mais j'ai des devoirs Mesdemoiselles.
- Oh! Des projets avec notre frère?
- En effet! Je dois aller le retrouver chez Mademoiselle d'Hataysse!
- Pf! Encore cette gourgandine, dit dédaigneusement Aneline.
- Ne soyez pas jalouse chère petite, la taquina Axel. Bien, mesdames, au plaisir! Je dois filer!"


Une fois qu'il leur eut tourner le dos, son regard s'embua de rage, et il s'empressa de buter contre le premier manant venu sous son pied. Par tous les diables!! À présent il était forcé d'aller voir cette fichue Héloïse!! Elle allait penser qu'il venait à elle comme un petit chien... Ah, il détestait ça!!

Promenant son air enragé durant tout le trajet menant à l'hôtel des Hataysse, il effraya quelques jeunes filles qui fuirent ce bel éphèbe aux yeux de glace.
Une fois devant l'immense grille de fer, aux pointes tendues vers le ciel, Axel posa une main sur les barreaux et balada ses yeux le long des murs en réprimant une grimace consternée.


"Hé! Mais vous êtes donc venu?!"


Se retournant, Axel reconnu son ami Valentin, habillé d'un complet couleur lie-de-vin, qui était suivi de trois domestiques chargés de paquets. Haussant les épaules, le jeune comte acquiesça.


"Ne tirez pas cette figure de galérien! Cela vous crispe la mâchoire!"


Machinalement, Axel se caressa le visage en fronçant les sourcils. Il détestait quand son ami critiquait son physique. En réalité, il était tellement habitué à se voir admiré que ce genre de réflexions l'agaçaient.

De plus, songeait-il avec mépris en regardant son ami, il n'avait à dire, lui, avec sa figure ronde et ses yeux si bons... Il ressemblait à un charmant chérubin brun, mais la candeur en moins. Mais il était attachant et plein d'esprit, c'était pour cela d'ailleurs qu'il était son ami.

Lui décrochant finalement un sourire franc, il l'empoigna par l'épaule et l'entraîna dans le jardin de Mademoiselle Héloïse d'Hataysse.












voilà pour l'instant, j'espère que cela vous plaira!
Review Tout ce qu'on ne se dit jamais...


Disclaimer .:: géré par Storyline v1.8.0 © IO Designs 2002 ::. Design adapté par korr