Auteur : Eon Hits : 2243
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"Vaurien!
- Brigand!!
- Viens ici que je te t'attrape!!!"

Un éphèbe se mit à la poursuite d'un grand homme brun. L'éphèbe était très grand, très mince, élancé et à l'air arrogant. Ses longs cheveux blonds attachés en catogan lui giflaient le visage, tandis qu'il se mettait à la poursuite de son ami.
Celui ci, entièrement vêtu de marron, sa chemise blanche remontée jusqu'au coudes, courrait à en perdre haleine, riant en gaspillant son air, et bientôt, se retrouva rattrapé par l'éphébe qui le tira par les cheveux.

"Aïe!!! Oscar tu me fais mal!!
- Fillette! fit l'autre en lui tirant la langue."

Essoufflés, ils tombèrent comme des masses sous un arbre, s'allongeant sur l'herbe verte en reprenant leur souffle. Bras croisés derrière la nuque, se laissant caresser par la lumière filtrant les feuillages, ils respirèrent l'air frais de cet été, ce juillet éblouissant qui irradiait de fraicheur.

"J'ai faim...
- Ton ventre vient de briser mon instant magique André.
- Je veux une pomme.
- Et moi que tu te taises... T'as qu'à te lever et tu trouveras plus vite!"

L'autre poussa un soupir, et resta allongé. Si il fallait se lever, autant rester par terre...
Comprenant qu'elle allait devoir supporter les plaintes de ventre de son ami de valet si il ne mangeait pas immédiatement sa pomme, Oscar leva les yeux au ciel et se décida à se lever, accompagnée par le sourire ironique d'André: qu'elle gratifia d'un coup de pied aux côtes.

Elle se mit à avancer parmi les arbres fruitiers plantés aux alentours du château. Cet été, Oscar s'était offerte un mois de congé bien mérité, et avait quitté Jarjayes avec toute la famille pour aller s'installer sur leurs terres de Loire. En réalité, elles appartenaient à l'une de ses soeurs, qui les accueillait avec plaisir car elle était seule au château. Près d'Amboise, l'endroit regorgeait de vieilles pierres, de lierre et de demeures fleuries, on y respirait les fruits de saisons et la douceur de vivre acidulée...
Les rayons de soleil blancs balayaient le visage d'Oscar, elle avançait presque en aveugle avec toute cette radieuse lumière, et ne retrouvait la vue qu'entre deux feuillages.
Soudain, son pied buta contre un fruit. Elle baissa les yeux, trouva une pomme à moitié entamée. Elle releva la tête, et aperçu alors un grand pommier au tronc fin, et aux branches déployées en coupe, au bout desquelles pendaient de gros rubis ronds comme des billes.
Elle se hissa sur la pointe des pieds pour en décrocher une, lorsqu'elle remarqua un morceau de tissus rose qui flottait au dessus du sol. Intriguée, elle se décala, et aperçu une jeune fille perchée sur une échelle, un panier à la main, qui faisait sa provision de fruits.

C'était une grande fille brune, aux cheveux chocolats longs et très fins, qui lui descendaient à la taille et qui ondulaient en spirales souples. Elle avait un ruban rose noué dans ses cheveux et qui lui dégageait son front de marbre. Elle était extrêmement fine, tout comme ses traits qu'apercevait Oscar en tournant la tête. C'était comme si elle avait été taillée par le plus fin des ciseaux, le plus fins des pinceaux. Tout était délicat, un peu comme une poupée de porcelaine, on avait presque peur de la toucher. La lumière se reflétait admirablement sur sa peau, en facettes lumineuses et étincelantes. Toute légère dans sa fine robe de mousseline, elle levait les bras pour cueillir les fruits les plus hauts. Sa bouche en forme de coeur, rouge cerise, était celle d'une enfant pleine de candeur et d'innocence.
Dans son panier, la jeune fille avait déjà récupéré fraises et cerises, qu'elle avait déposé avec insouciance mais qui étaient digne d'une nature morte.

"Bonjour Mademoiselle, fit Oscar avec un sourire."

L'autre tourna la tête vers elle, et le colonel aperçu enfin son regard. Un regard bleu sombre, presque noir, qui rendait ce sourire qu'elle pensait candide, quelque peu... troublant.

"Bonjour, qui êtes-vous?
- Oscar François de Jarjayes Mademoiselle.
- Bien, bien..."

Puis elle s'en retourna à sa cueillette. Fronçant les sourcils, Oscar passa sous l'échelle et se rapprocha de la jeune fille.

"Voulez-vous de l'aide?
- Non, non, fit l'autre distraitement.
- Vous êtes sûre?
- Je ne gâche pas ma salive pour dire le contraire de ce que je pense..."

Voix calme, douce, très féminine, mais dont les réponses agacèrent le colonel.
Elle resta pourtant là, semblant attendre qu'elle descende. Ainsi, lorsque la demoiselle sauta de son échelle en faisant voltiger ses fins jupons, elle était toujours près d'elle. L'autre lui décrocha un petite sourire mutin.

"Que voulez-vous Monsieur de Jarjayes?
- Je ne sais pas.
- Voulez-vous une cerise?"

Elle en prit une dans son panier et la tendit au colonel. L'autre resta sans rien dire, la jeune fille commença alors à avancer, lentement, faisant reculer Oscar vers l'arbre. Une fois que son corps frôla celui d'Oscar, elle glissa la cerise entre les lèvres de l'éphèbe, qui se laissa faire en savourant le fruit sucré.
Lentement, le jus commença à couler le long des lèvres roses du colonel, les couvrant d'un drap étincelant et rougeâtre. Les yeux rivés sur ces lèvres en forme de fruit, la jeune fille se hissa doucement sur la pointe des pieds, et posa ses lèvres sur celles d'Oscar, en mordillant cette bouche sucrée regorgeant de jus de cerise.
Le colonel, stupéfaite, n'osait faire un geste, et lorsque la jeune fille se détacha d'elle, elle était encore immobile, mais sentait toujours le goût des lèvres de l'inconnue contre les siennes.
Celle-ci était parfaitement calme, la contemplant en silence, penchant la tête par moment comme si elle la considérait avec application.

"Qui êtes vous? dit Oscar d'une voix blanche."

Le regard sombre se leva doucement vers elle, et l'inconnue sourit.

"Je m'appelle Exquise. Exquise Beauclerc..."

Exquise... Quel drôle de nom, songea le colonel en la regardant s'éloigner.
Ses doigts alors, caressèrent les lèvres étreintes, et elle sentit son ventre se pincer. C'était... bien agréable...
À cet instant, André surgit des fourrés en marmonnant quelque jurons à l'encontre de son amie.

"Qu'est-ce que tu faisais Oscar! Je t'attendais moi!!"

Mais son amie semblait totalement hypnotisée. Elle regarda alors sa main gauche, et aperçu une belle pomme rouge qu'avait dû lui glisser l'inconnue avant de partir. Alors, avec un sourire étrange, Oscar la tendit à André:

"Croque."
Review Au temps des cerises...


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